Le droit chemin

Déc 23, 2023 par

Osman Nuri TOPBAŞ

Être sur le droit chemin, dans son sens général, signifie avancer continuellement vers un but noble sans contradiction ni hésitation. Mais dans le soufisme, il est question de préserver la nature saine et la pureté de l’âme sans la corrompre.

Suite à la préservation de la pureté du cœur, le nafs se rapproche des bonnes mœurs et le cœur se rapproche de la spiritualité et de la moralité “muhammadienne-s. Les secrets divins commencent à se manifester à lui. Allah –Exalté soit-Il – devient son ultime but. Il perd l’intérêt pour tout ce qui ne concerne pas Dieu. À ce stade, le croyant s’investit corps et âme dans tout ce qui lui permettra d’atteindre son Créateur.

Bien que le Prophète r fût le meilleur exemple d’une telle personnalité parfaite, Dieu Tout-Puissant n’a pas manqué de lui dire « Fa’stakim kama umirta (Demeure sur le droit chemin comme il t’est commandé !)[1] » pour signifier à point il s’avère très difficile de préserver cet état de droiture.

En fait, l’Envoyé de Dieu qui a déduit de ce passage coranique la difficulté de cette condition, a dit un jour face au lourd fardeau de sa responsabilité prophétique :

« La sourate Hûd m’a fait vieillir… »

Les Compagnons demandèrent :

« Ô Messager d’Allah ! Est-ce les histoires des prophètes qui y sont racontées qui t’ont fait vieillir ? »

Le Prophète r répondit :

« C’est le verset {Demeure sur le droit chemin comme il t’est commandé !} … »

En effet, après la révélation de ce verset, les cheveux blancs ont commencé à apparaître dans la chevelure bénie et dans la barbe bénie du Messager d’Allah, qui étaient si noires alors qu’il n’y avait aucun cheveu blanc jusqu’alors.

Les exégètes commentent ainsi ce verset en quelques mots :

« Ô Prophète ! Tu dois agir conformément à la morale et aux règles du Coran et être un exemple d’une direction concrète, afin qu’il n’y ait aucune place pour le moindre doute ou hésitation à ton sujet ! N’écoute pas les paroles des polythéistes et des hypocrites, laisse-les à Allah ! Sois dans la bonne direction, comme cela t’a été commandé dans tes devoirs particuliers et généraux, et ne t’éloigne pas du droit chemin ! Quelle que soit la difficulté de l’exécution de l’ordre qui t’a été révélé, ne sois pas découragé par aucun obstacle dans la mise en application et la transmission de cet ordre ! Ton Seigneur demeure à tes côtés. »

À cet égard, Abdullah ibn ‘Abbâs a déclaré :

« Dans le Coran, il n’y a jamais eu d’adresse divine plus sévère envers le Messager d’Allah que ce verset. »

D’autre part, l’ordre divin donné au Prophète dans le verset susmentionné est également valable pour tous les membres de sa communauté. En fait, ce qui a fait que ce verset a fait vieillir le Prophète r, c’est le souci de ce dernier pour les croyants, étant donné que c’est eux qui sont les plus concernés par cet ordre divin. Car, Dieu Lui-Même a dit au sujet du Prophète :

« (Ô Mon Bien-aimé !) Tu es sur un droit chemin ! »[2]

Ceci dit, tout comme il n’y a pas d’autre moyen pour atteindre Dieu que de suivre le droit chemin, il n’y a pas d’ordre divin plus difficile à accomplir et de dimension plus élevée que le fait de persévérer dans ce droit chemin nonobstant tous les obstacles et épreuves. Et c’est d’ailleurs à cause de cette grande difficulté à accomplir cet ordre divin que cela a été soumis à la communauté comme une prière/supplication, et donc un avertissement dans la sourate Al-Fâtiha que nous récitons plusieurs fois par jour.

Le fait que la supplication pour être guidé dans le droit chemin soit formulée sous la forme de « Ihdina (Guide-nous) … » dans la sourate Al-Fâtiha et qu’elle soit ainsi récitée par un croyant au moins quarante fois par jour démontre à quel point il est difficile de se maintenir dûment sur la bonne direction.

Sirât al-mustaqîm, selon les expressions du Coran, signifie la voie d’Allah, la voie droite, la bonne voie, le Livre d’Allah, la croyance et les choses liées à la croyance, l’Islam et la charia islamique, la voie du Prophète et des nobles Compagnons, la voie de la Sunna et de la communauté bien guidée, la voie des justes, la voie des martyrs, la voie du bonheur dans ce monde et dans l’Au-delà, la voie du Paradis, etc.

Sirât al-mustaqîm est donc la voie des serviteurs distingués qu’Allah Tout-Puissant a bénis. Ces serviteurs sont d’abord les prophètes, puis les véridiques, les martyrs et les justes. Les adeptes du droit chemin sont donc ceux qui suivent les pas de ces derniers.

Sirât al-mustaqîm signifie un chemin droit et direct qui n’a aucune inclinaison, courbure ou détours.

Sirat al-mustaqîm est le chemin qui mène à Allah. Allah Tout-Puissant dit :

« Le chemin d’Allah à Qui appartient ce qui est dans les cieux et ce qui est sur la terre. Oui, c’est à Allah que s’acheminent toutes les choses. »[3]

Demeurer sur le droit chemin est une véritable adoration d’Allah. Il est dit dans les versets en relation :

« Adorez-Le donc : voilà le chemin droit ! »[4]

« Quiconque s’attache fortement à Allah, il est certes guidé vers un droit chemin. »[5]

Sirat al-mustaqîm est décrit comme suit dans la sourate Al-An’âm :

« Dis : « Venez, je vais réciter ce que votre Seigneur vous a interdit : ne Lui associez rien ; et soyez bienfaisants envers vos père et mère. Ne tuez pas vos enfants pour cause de pauvreté. Nous vous nourrissons tout comme eux. N’approchez pas des turpitudes ouvertement, ou en cachette. Ne tuez qu’en toute justice la vie qu’Allah a fait sacrée. Voilà ce qu'[Allah] vous a recommandé de faire ; peut-être comprendrez-vous.

Et ne vous approchez des biens de l’orphelin que de la plus belle manière, jusqu’à ce qu’il ait atteint sa majorité. Et donnez la juste mesure et le bon poids, en toute justice. Nous n’imposons à une âme que selon sa capacité. Et quand vous parlez, soyez équitables même s’il s’agit d’un proche parent. Et remplissez votre engagement envers Allah. Voilà ce qu’Il vous enjoint. Peut-être vous rappellerez-vous.

« Et voilà Mon chemin dans toute sa rectitude, suivez-le donc ; et ne suivez pas les sentiers qui vous écartent de Sa voie. » Voilà ce qu’Il vous enjoint. Ainsi atteindrez-vous la piété. »[6]

Le serviteur ne pourra atteindre et demeurer dûment dans le droit chemin à moins que son amour pour Allah surpasse son amour et sa dévotion pour tout ce qui est autre qu’Allah. Pour cela, il est nécessaire de connaître Allah à travers Ses attributs, c’est-à-dire détenir la science de la mârifatullah. Ceci dit, sirât al-mustaqîm est donc la mârifatullah. Car, le serviteur qui atteint la mârifatullah et organise tous les aspects de sa vie selon les nécessités de celle-ci, sera préservé du mal de son âme et des incitations de Satan, et ne vivra qu’en aspirant à la satisfaction d’Allah. Son cœur sera envahi par les manifestations de la grâce divine. À cette dimension, il aura ouvert une fenêtre spirituelle au-delà du monde apparent que l’œil voit et l’oreille entend, et l’univers entier s’ouvrira à lui tel un livre truffé de sagesses et de réalités divines.

Abû Sa’id al-Harraz, l’un de nos grands savants, a vu Satan dans son rêve et a voulu le frapper avec une baguette. Iblis lui a dit :

« Ô Abû Sa’id ! Je n’ai pas peur de ce bâton parce qu’il est visible. Ce dont j’ai peur, ce sont les rayons lumineux du soleil de l’ingéniosité émis depuis la voûte du ciel des cœurs des vertueux, et qui consument et réduisent en cendres tout ce qui ne concerne pas Allah. »

D’autre part, tous les efforts et sacrifices du serviteur qui n’est pas dans la droiture seront vains. L’argent qu’il dépense dans cette voie ne lui profitera pas. D’ailleurs, demeurer sur le droit chemin est considéré comme le plus grand miracle.

Selon un autre concept, le sirât al-mustaqîm consiste à persévérer, de façon modérée, sur le chemin de la Vérité, sans tomber dans l’excès ou bien dans le laxisme. C’est faire ce qui est ordonné comme cela a été ordonné et de la plus belle manière possible. C’est comme par exemple, sur le plan financier, l’avarice est interdite tout aussi que le gaspillage.

L’évènement suivant est très exemplaire. En fait, certains Compagnons avaient avisé de se détourner de tout ce qui est lié à ce bas-monde, de passer leur temps, jour et nuit, en état d’adoration, et de ne pas fonder de famille ; puis ils en ont parlé au Prophète. (Pour toute réponse) le Messager d’Allah r leur avait également ordonné la modération.

Il faut savoir que le Prophète r a vécu toute sa vie selon un programme bien défini et dans les limites de la force humaine, afin qu’il soit l’exemple (type) pour les autres. Dans le cas contraire, les actes qu’il aurait accomplis et dont l’accomplissement nécessite des particularités prophétiques, n’auraient pas été un exemple pour personne. Ses journées étaient consacrées à l’accomplissement de ses devoirs sociaux, à savoir l’adoration en communauté, les relations familiales et sociales, le repos et la transmission des enseignements divins. Le Messager d’Allah r accomplissait ces devoirs de la meilleure façon et donnait l’exemple à sa communauté.

Dans ce cas, il n’est donc pas juste de sortir du cadre des enseignements et pratiques du Messager de Dieu, de faire preuve de négligence concernant certains de ses enseignements et de se concentrer jusqu’à l’excès sur d’autres. En d’autres termes, il convient d’organiser notre vie conformément aux principes de vie qui nous ont été soumis par le Prophète r, et non selon nos propres principes.

 Abdul Khâliq Ghujduwanî a très bien expliqué ce point. Un jour, on lui posa la question suivante :

« ‒ Doit-on faire ce que l’âme veut ou ce qu’elle ne veut pas ? »

L’homme pieux répondit comme suit :

« ‒ Il est très difficile de trancher entre les deux. La plupart des gens se trompent au sujet des aspirations de l’âme, à savoir si elles sont nobles ou sataniques. Pour cette raison, on ne doit faire que ce qu’Allah ordonne, pas ce qu’Il interdit. Telle est la vraie servitude envers Dieu. »

Allah Tout-Puissant dit :

« Dis : « Voici ma voie, j’appelle les gens à [la religion] d’Allah, moi et ceux qui me suivent, nous basant sur une preuve évidente. »[7]

À des époques de l’humanité où la plupart des gens étaient esclaves de leurs âmes et s’adonnaient à grande échelle à l’injustice, à l’oppression et à toutes sortes d’actes ignobles, Dieu leur a envoyé des serviteurs exceptionnels, à savoir des prophètes pour les guider dans le droit chemin. Ces êtres bénis, désignés comme exemples et symboles de droiture pour leurs communautés, ont été chargés d’accomplir ces trois devoirs principaux :

a. Annoncer et propager les versets d’Allah,

b. Enseigner le Livre divin et la Sagesse,

c. Guider les gens dans le chemin de droiture en purifiant leurs âmes.  

Cette ligne de conduite bénie, qui a commencé avec Adam u, a atteint la perfection avec le Prophète Muhammad r.

Le Coran, qui émerveille les croyants et rappellent aux impies leurs faiblesses, et le sirât al-mustaqîm, qui est une manifestation de la personnalité et de la vie du Prophète, ont été soumis à toute l’humanité comme un parfait échantillon.

Sirât al-mustaqîm est un ensemble de bonnes actions. Les bonnes actions dépendent de deux conditions :

1. « Tâzîm li-amrillâh », c’est-à-dire pouvoir accomplir l’ordre divin avec crainte et humilité,

2. « Shafkat li-khalkillâh », c’est-à-dire manifester de l’amour, de la compassion et de la miséricorde envers toutes les créatures par amour pour le Créateur.

En d’autres termes, le droit chemin consiste à entretenir la flamme d’amour pour le Messager de Dieu, à s’efforcer à bénéficier d’une part de sa personnalité exemplaire, à se moraliser avec ses valeurs morales, à vivre avec l’esprit du Coran et de la Sunna, à s’éloigner autant que possible des plaisirs mondains, pour pouvoir finalement atteindre les secrets de l’adoration, de la servitude envers Dieu et de la connaissance divine.

Il est essentiel pour une personne de garder son monde intérieur sous surveillance permanente afin de pouvoir toujours déterminer la vérité et la bonne direction. D’autre part, si le serviteur accomplit les bonnes actions, aussi nombreuses soient-elles, et qu’il s’avère qu’il ne les fait pas en aspirant à la satisfaction divine, ses œuvres seront sanctionnées par un manque de sincérité et n’auront aucun mérite auprès d’Allah. Pour cette raison, tout comme les actes accomplis doivent être conformes aux ordres divins, on doit veiller également à ce qu’ils soient accomplis uniquement en vue de l’agrément divin. Dans le cas contraire, nos œuvres seront réduites à de la cendre abandonnée au gré du vent.  

Même ‘Umar r avait du mal à maintenir la ligne de la sincérité et du droit chemin dans sa vie.  Devenu calife, il demanda dans son sermon (d’introduction) :

« ‒ Ô gens ! Que ferez-vous si je m’écarte du chemin d’Allah ? »

Sur ce, un Bédouin se leva et dit :

« Ô Calife ! Ne t’inquiète pas, si tu te trompes, nous te redresserons avec nos épées ! » Suite à ces paroles du Bédouin, le Calife ‘Umar fut satisfait et le remercia. Puis il ajouta :

« Louange à Toi, ô Seigneur ! Tu m’as béni avec une communauté qui me corrigera quand je me tromperai ! »

Pour préserver la sécurité de la communauté, le Prophète avait seulement informé Hudhayfa de ceux qui avaient des traces d’hypocrisie dans leurs cœurs. ‘Umar, ayant su cela et s’inquiétant pour son propre sort, demanda un jour à Hudhayfa :

« Ô Hudhayfa ! Dis-moi, pour l’amour de Dieu, suis-je sur la liste de ces hypocrites ? »

            Hudhayfa répondit :

« Ô Calife ! Ce n’est qu’à toi que je le dirai ; tu ne fais pas partie de ces hypocrites. »

Hasan al-Basrî fit savoir ceci à son élève Tâwûs, un savant (réputé) en matière de Hadith :

« ‒ Ô Tâwûs ! Si enseigner les hadiths te rend arrogant, arrête alors d’enseigner cette science ! »

Alors que l’Imam Al-Ghazalî était en train d’enseigner à trois cents étudiants, il fut soudainement angoissé par la pensée suivante :

« En enseignant à tant d’étudiants, suis-je vraiment sur la voie de la satisfaction divine ou bien suis-je sur le point d’être englouti dans le bourbier de la notoriété ? »

Suite à cette introspection, l’Imam Al-Ghazalî réduisit ses biens et ses propriétés à un niveau modéré. Il arrêta ses cours quelque temps et s’isola dans le but de se réfugier auprès d’Allah Tout-Puissant. Ainsi, l’esprit du Messager d’Allah s’est manifesté en lui et il fut habité par la quiétude. Finalement, afin de signifier qu’il avait été libéré de ses angoisses, il déclara : « Je suis en paix, gloire à Dieu. » Désormais, un tout autre Al-Ghazalî s’était réveillé en lui.

Alors que Yâvuz Sultan Selim Han revenait de la campagne d’Égypte où il avait remporté nombre de victoires, il apprit que les habitants d’Istanbul l’attendaient avec une grande excitation. À ce moment-là, et bien qu’il se fût approché de la ville, il ne pénétra pas immédiatement dans Istanbul, mais fit camper son armée dans les plaines en arrière situées à Çamlıca. Angoissé par la peur de ne pas succomber à son égo, il dit à son proche conseiller Hasan Can :

« Mon cher conseiller ! Lorsque la nuit tombera et que la foule se dispersera, nous ferons notre entrée discrètement dans Istanbul. Que les applaudissements, les arcs de triomphe et les compliments des mortels ne nous rendent pas fiers de nous et ne nous livrent pas à nos passions ! »

Finalement, le soir tomba et après la tombée de la nuit, ils entrèrent dans la ville en toute discrétion.

Le cœur est un lieu d’observation de Dieu. La vertu de l’adoration est basée sur la pureté du cœur. Il est dit dans le verset suivant :

« Le jour où ni les biens, ni les enfants ne seront d’aucune utilité, sauf celui qui vient à Allah avec un cœur sain. »[8]

Mawlânâ Rûmî donne l’exemple suivant concernant le cœur pur :

« Yûsuf u a demandé à un ami qui revenait d’une expédition :

« Quel cadeau m’as-tu apporté ? »

Son ami répondit :

« Qu’est-ce qui te manque à toi ? Cependant, puisqu’il n’y a rien de plus sublime que ta beauté, je t’ai apporté un miroir pour que tu puisses toujours observer les manifestations de ta beauté… » »

Allah Tout-Puissant est au-dessus de tout. Il est la Véritable Beauté et la Source de toutes les beautés. Il convient donc se présenter à Lui en préservant toute la pureté du cœur afin que puissent se manifester à nous les secrets et les réalités infinis de Sa Beauté Sublime.

En effet, il est dit dans un hadith shârif :

« En vérité, Allah ne regarde ni vos apparences ni vos actes, mais Il regarde vos cœurs. »

Ô Allah ! Guide-nous et maintiens-nous sur le droit chemin ! Guide-nous sur la voie qui mène à Toi et à Tes faveurs incommensurables, la voie des prophètes, des véridiques, des martyrs et des justes ! Ne nous égare pas ! Éloigne-nous des sentiers de ceux qui encourent Ton courroux, des voies qui mènent à l’opprobre, à la destruction et au malheur éternel !

Amin !


[1] Sourate Hûd, verset 112.

[2] Sourate Yâ-Sîn, verset 4.

[3] Sourate Ash-Shûra, verset 53.

[4] Sourate Al-‘Imrân, verset 51.

[5] Sourate Al-‘Imrân, verset 101.

[6] Sourate An-An’âm, versets 151-153.

[7] Sourate Yûsuf, verset 108.

[8] Sourate Ash-Shu’arâ’, versets 88 et 89.

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1 Commentaire

  1. Mehmet Yılmaz

    L’article en question offre une analyse intéressante et éclairante sur ce sujet !

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