La religion, ce n’est pas simplement la prière, le jeûne, le pèlerinage… c’est aussi la foi, l’adoration, la moralité

Mar 13, 2019 par

Nurullah Seydaoğlu

La religion, de par sa fonction même de favoriser tous les aspects de l’homme, concerne toute l’existence. Nous pouvons affirmer à cet égard que « la religion est un tout, une globalité ». Autrement dit, la religion ne s’intéresse pas seulement qu’à un seul aspect de l’homme au détriment des autres.

En religion, il existe des points précis en matière de foi. Des sujets tels que la notion de tawhid (unicité divine), de Jugement dernier, d’anges… font partie de ces points précis. Fondamentalement parlant, c’est ce que l’on attend de l’homme d’une manière intime et primordiale. En d’autres termes, c’est croire en Allah et aux choses qu’Il nous recommande de porter foi. C’est ici d’ailleurs la référence qui nous limite en tant que musulmans.

Après la foi vient l’adoration. C’est-à-dire tout ce qui est lié au domaine de la pratique. C’est une caractéristique relative à l’accomplissement de ce que la foi exige. C’est mettre à exécution la foi et passer à la pratique. Notre Seigneur Tout-Puissant, en révélant la parole suivante : « Je n’ai créé les djinns et les hommes que pour qu’ils M’adorent »[1] révèle en fait d’une manière claire l’objectif de la création. Autrement dit, l’objectif de la création, c’est l’obéissance (à Allah) et l’adoration.

Parallèlement à la foi et à l’adoration, il existe un autre aspect de la religion : la moralité et le côté social de l’homme. Ici nous voulons mettre en évidence les comportements que l’individu doit impérativement manifester en société et dans ses relations avec les autres.

Ce point est tellement important qu’il ne faut pas le perdre de vue. Par conséquent, force est d’affirmer que la religion ne se limite pas seulement à la prière, au jeûne, au pèlerinage et à l’aumône (zakat). Par ailleurs, nous comprenons à quel point ces actes d’adoration sont importants et connus en tant qu’éléments clés de la religion. En revanche, l’erreur serait de penser que la religion serait incapable d’offrir un apport essentiel à la vie sociale et relationnelle de l’homme.

Parallèlement à la foi et à l’adoration on trouve la moralité avions-nous dit. En s’adressant à Son Messager (pbsl) en ces termes : « Et tu es certes d’une moralité éminente »[2] Allah le Très-Haut veut souligner par-là la nature de l’une de ses missions fondamentales : à savoir le parfait modèle en matière de moralité.

La moralité, étant prise dans n’importe quel sens, en bien ou en mal, est une création : c’est-à-dire un apport d’attributs provenant de l’œuvre divine. Quand on porte une réflexion pertinente sur la création, il ressort que l’espèce humaine n’a pas été créée pour rien, mais bien pour qu’elle atteigne un but bien déterminé. Cette espèce humaine est dotée d’une valeur sublime ; une valeur sans nulle autre pareille qui lui fut octroyée. Elle est dotée d’une infinité de grâces.[3] Allah a désigné l’homme en vue d’être Son représentant sur terre. À ce titre, les êtres humains bénéficient d’une valeur qui les place au-dessus des anges.[4] En revanche, en cas d’insuccès, leur condition demeure inférieure à celle des animaux.[5]

En créant l’homme, Allah le Très-Haut lui avait aussi préparé un vaste programme. Pour dire simplement les choses, disons qu’Allah lui a tracé une « carte routière » et lui a montré les différents chemins qui mènent au succès. Ensuite, Il l’a laissé libre (ou plus littéralement Il l’a laissé à son épreuve) sous l’influence de son ego et de Satan. D’ailleurs, c’est ici qu’est mis pleinement en évidence le secret révélant que le monde d’ici-bas, ainsi nommé, est un lieu d’épreuves.

Ainsi donc, la moralité consiste à agir conformément à ce programme directement issu de la création. Autrement dit, dans un sens spécifique, elle représente tout ce que l’homme doit accomplir dans le cadre des limites et des mesures préétablies par Allah.

La moralité a été également définie comme étant la connaissance saine de l’ego. Platon, notamment, définit la moralité comme étant l’effort et l’énergie que l’on déploie, à l’instar de l’âme, pour atteindre Allah dans la mesure du possible.

Jadis, nos savants disaient : « La moralité primaire, c’est la maîtrise des intérêts de la vertu. » Cela signifie que partout où les intérêts de la vertu sont maîtrisés, il règne alors des sentiments issus de la haute moralité. À court terme, la moralité peut être définie comme étant l’orientation directe de l’homme vers la bonté et la justice.

La religion, dans le sens que lui donne la moralité, c’est la parole juste qu’adresse l’homme dans ses relations avec autrui ; c’est la loyauté, le respect du dépôt, l’aide apportée au voisin, la considération pour l’ami, le compagnon ; c’est l’honneur dû à l’invité.

La religion, c’est la politesse, c’est œuvrer dans l’intérêt d’autrui ; c’est ne pas causer de peine aux hommes. Quand notre Prophète (pbsl) dit : « Le musulman est celui dont on ne craint ni la main ni la langue »[6], il veut dire par là et de manière claire que le musulman constitue en lui-même une source de confiance entre les hommes. La mise en place d’une société idéale dépend de la formation d’une société musulmane exemplaire, mais également d’individus assurant la confiance entre eux, pensant aux intérêts des uns et des autres et considérant les intérêts communs au-dessus de leurs intérêts propres.

Qui plus est, même au sein des pratiques liées aux salutations mutuelles repose un sens commun de haute moralité qui assure l’amour et la solidarité entre les hommes.

 

La foi de l’homme se charge de faire de lui un bon serviteur, un individu conscient, et de lui assurer une haute moralité. En témoignent certains hadiths qui font entrevoir le sens qu’il existe effectivement une corrélation entre la foi et la haute moralité. D’une part cette corrélation est liée à l’accomplissement des injonctions prescrites par l’islam et d’autre part l’accent est mis sur la foi juste, la haute moralité et l’accomplissement d’œuvres pies. À titre d’exemple nous pouvons mentionner les hadiths suivants :

« En matière de foi, les croyants les plus accomplis sont ceux dont la moralité est également accomplie. »[7] 

« Toutes les fois où l’un d’entre vous agit mal envers son frère musulman, rien que pour la satisfaction de son ego, celui-ci n’a certes pas fait d’effort dans la foi. »[8]

 

« Je n’ai été envoyé que pour parfaire les vertus morales »[9] dit notre Prophète (pbsl), exprimant ainsi l’une des raisons pour lesquelles il a été envoyé en qualité d’exemple (vivant) de haute moralité. Notons prestement que cette affirmation constitue pour nous un conseil qui nous est personnellement adressé et qui nous recommande de mener un style de vie fondé sur cette haute moralité. Afin de bénéficier du bonheur et des intérêts attachés à ce monde d’ici-bas et à l’au-delà, il est par conséquent indispensable que nous nous rattachions aux principes de notre Prophète (pbsl) dans ce domaine ainsi que dans tous les autres. N’oublions pas le fait que toute société qui conserve les vertus de la moralité progresse toujours et que celle qui embrasse les valeurs inhérentes à la moralité en ressort à tout moment avantageuse.

 

Entre la haute moralité du Prophète (pbsl) et le Coran, il existe également une relation étroite. Les particularités prévues par le Coran ainsi que le modèle qui y ressort sont totalement conformes à la manière d’être de notre Prophète (pbsl). Toute sa personnalité, tout ce qu’il était, reflétait le Coran ; il l’avait tellement assimilé et vécu quotidiennement que cela avait fini par refléter sur sa moralité. C’est pour cette raison que lorsque ‘A’icha fut un jour questionnée au sujet de la moralité du Prophète (pbsl), cette dernière répondit : « La moralité du Prophète était le Coran. »[10]

 

C’est encore le Coran qui nous informe de la notion d’ahsani taqwim[11], ce qui signifie littéralement « la plus parfaite forme créée ». Effectivement, des particularités éminentes et introuvables chez les autres créatures ont été accordées à l’homme. Parmi celles-ci nous découvrons que l’homme porte en lui une excellente particularité du point de vue physique et spirituel. Cependant, dans l’expectative que ce dernier atteigne les plus hauts degrés (en matière de vertu) en raison de son excellent potentiel, la faculté de pouvoir faire des choix lui a été donnée afin qu’il soit en mesure de faire face au secret de l’épreuve. Par conséquent, bien que l’homme ait pratiquement hérité de la beauté plénière de la création ainsi que d’un bon caractère, le Prophète (pbsl) fut néanmoins amené à faire l’invocation suivante relevant de la nécessité de parachever cette beauté : « Mon Seigneur, de même que Tu m’as créé de si belle façon, rend également belle ma moralité. »[12]

 

Un mot maintenant pour toutes les personnes détentrices d’un quelconque pouvoir : Agissez de manière consciente et responsable, comportez-vous dignement, soyez polis et courtois envers vos administrés. L’instruction suivante, adressée par le Prophète (pbsl) à Mu’âdh ibn Jabal au moment où il l’avait nommé gouverneur du Yémen, est particulièrement délicate et impressionnante à la fois : « Ô Mu’âdh ! Embellis ta moralité à l’encontre des gens. »[13]

 

En conséquence, force est de constater que la moralité influence les actions que l’homme accomplit. C’est-à-dire que la haute moralité contribue à purifier les mauvaises actions alors que le contraire est également vrai : les mauvaises actions sont amenées à détruire les bonnes. Notre Prophète (pbsl) a dit à ce propos : « Un noble caractère dissout les péchés de la même manière que l’eau fait se dégeler la glace ; et un mauvais caractère altère une action comme le vinaigre altère le miel. »[14]

Dans la même lancée, cette autre parole du Prophète (pbsl) évoque la nécessité d’une prise de conscience rapide de la faute commise et de la possibilité pour les personnes de haute moralité de s’amender grâce aux particularités dont ils disposent : « Comportez-vous avec les gens en faisant preuve d’une haute moralité. Faites suivre la mauvaise action d’une haute action, cette dernière l’effacera. » [15]

 

Terminons notre réflexion en citant cette invocation faite par notre Prophète (pbsl) : « Ô mon Seigneur ! Je me confie à Toi contre toute divergence et contre tout défaitisme, contre toute hypocrisie et contre toute mauvaise moralité. »[16]

 

[1] Coran, Ad-Dariyat, 51/56.

[2] Coran, Al-Qalam, 68/4.

[3] Voir par exemple Coran, Al-Isra, 17/70.

[4] Concernant ce sujet, voir les références coraniques suivantes : Coran, Al-Baqara, 2/30 ; Al-An’am, 6/165.

[5] Coran, Al-Furqan, 25/44.

[6] Muslim, Iman, 14.

[7] Tirmidhî, Rida, 11.

[8] Bukhârî, Iman, 7; Muslim, Iman, 17.

[9] Malik, Mutawwa, Husnu’l huluk, 8.

[10] Muslim, Musafirun, 139.

[11] Coran, At-Tin, 95/4.

[12] Ahmed ibn Hanbal, Musnad, I/403.

[13] Malik, Muwatta, Husnu’l huluk, 1-2.

[14] At-Tabarânî, Al-Mu’jam Al-Aswat, I/470.

[15] Tirmidhî, Birr, 55; Darimî, Riqaq, 74.

[16] Nasa’î, Sunan, Al-isti’adha, 21.

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