Le Ramadan et le jeûne

Mar 12, 2019 par

Prof. Dr. Hasan Kâmil Yılmaz

Le jeûne de Ramadan, c’est le mois du Coran et du pardon. Au moment de la descente du Coran, c’est un climat intense qui se crée dans l’accomplissement des pratiques religieuses et particulièrement du jeûne dans le cadre des cinq obligations fondamentales de l’Islam. Ce qui fait que le Ramadan est le Ramadan, c’est qu’il est le mois du Coran et du Jeûne. Le jeûne est une pratique religieuse exaltée par Allah Ta’ala : « le jeûne est pour moi et c’est seulement Moi qui le rémunère ».1 Cette expression porte deux sens dans ce hadith qudsi :

1- Le jeûne a une place particulière par rapport aux autres pratiques religieuses. Toutes les autres pratiques sont en fait des actions qui appartiennent à des organes visibles de l’extérieur. Alors que le jeûne peut s’exécuter sans que les organes visibles ne soient actifs. Le jeûne est un sentiment d’octroi – c’est une pratique religieuse qui s’approche le plus de la soumission (dans le sens islamique du terme) et portant jusqu’au fait d’apercevoir Allah.

2- Le jeûne appartient à l’attribut de Samad. Samad indique que toute personne et toute chose dépendent de lui. Par contre, Allah ne dépend ni de personne ni d’aucune chose. Grâce au jeûne, l’homme peut vivre la révélation de l’attribut divin Samad pour une durée limitée en s’éloignant des besoins temporels et matériels comme manger et boire. De ce point de vue, Allah Ta’ala est désigné par Son propre attribut, il place à une position particulière tous ceux qui parviennent à une bonne morale en même temps que son éthique en énonçant : « C’est Moi qui récompensera les jeûneurs. »

Allah promet à ceux qui réalisent de bonnes actions religieuses de leur accorder en contre partie dix pour un et sept cent pour dix (en termes de récompense). Pour ceux qui sont seulement patients, cette récompense sera sans limites. 2 Selon l’expression traditionnelle : « le jeûne est la moitié de la patience », le jeûne est simultanément une action de patience et c’est pourquoi sa rémunération est sans limites.

Le jeûne n’est pas uniquement un acte physique consistant à s’abstenir de manger et de boire. Pour que le jeûne soit une pratique qui instruit notre volonté, qui freine nos vices, qui met à jour nos pensées par la centralisation des pratiques religieuses, il est nécessaire de l’accomplir avec les six organes suivants :

1- En protégeant nos yeux des choses proscrites par la religion, les suspicions et les choses insignifiantes,

2- En empêchant nos oreilles de distinguer les péchés, les choses infondées et proscrites par la religion,

3- En Tenant notre langue loin des choses vides qui ne l’intéresse pas, des choses insignifiantes, des commérages et des diffamations,

4- En remplissant notre cœur de piété et d’amour pour Allah, tout en le purifiant des pensées interdites et des contestations inexpressives,

5- En empêchant notre main d’atteindre des choses proscrites par la religion, les suspicions et l’accomplissement de vilaines actions,

6- En évitant de presser nos pieds vers des objectifs indésirables et non ordonnés.

Nous pouvons comprendre dans l’œuvre d’Abû Tâlib Mekkî que les personnes qui accomplissent le jeûne en maîtrisant ces six organes pourront accroître leurs vertus puisque le jeûne n’est pas une pratique qui consiste uniquement à s’abstenir de manger et de boire. C’est pourquoi ceux qui réalisent le jeûne la journée et qui le débutent par des choses proscrites par la religion, ceux qui mangent par toutes sortes de commérages de la viande de cadavre sans toucher la nourriture halal, et ceux qui prononcent des choses proscrites par la religion, que ce soient par leurs yeux, leurs paroles ou bien de leurs origines, leur jeûne consistera à demeurer affamés et assoiffés. La médisance effectuée entre les amis d’Allah dissout le jeûne ; du moins, il est indiqué par certains qu’il n’y aura pas de récompense morale alors que le but du jeûne n’est pas uniquement de rester affamé et assoiffé, c’est de se tenir éloigné du péché. Par conséquent, lors de certaines prières, il faut rester éloigné des mauvaises paroles et des mauvais comportements. Car tant qu’une personne prononce des calomnies et ne quitte pas ces habitudes dans sa pratique religieuse, alors Allah n’a pas besoin qu’elle s’abstienne de manger et de boire.

La vérité du jeûne, c’est l’abstention. L’abstention, c’est la maitrise de ses inconduites, l’effort de vaincre ses désirs temporels et passagers. L’abstention est également composée par des règles. Ces dernières protègent d’une part le ventre de manger et de boire et d’autre part les organes en question ; elles protègent également tout le corps de toute opposition aux lois islamiques. C’est, enfin, de faire accomplir le jeûne aux cinq organes sensoriels.

Allah a créé l’homme de manière à ce qu’il soit dans le besoin de s’alimenter pour pouvoir vivre. Par contre, ce besoin ne doit pas transformer l’homme en un jouet de délices de la planète terre. Dans ce contexte, il faut abstenir le vice du lehv et du laib – des jeux et du divertissement ; c’est-à-dire qu’il est indispensable de rester loin des choses insignifiantes et du péché. Tous les états et comportements de celui qui se préserve des péchés équivaut en conséquence à la valeur du jeûne.

La célèbre polémique revient à la surface : « Est-ce que le monde est nécessaire à l’homme pour manger ou bien pour vivre ? » Les amis d’Allah envisagent de manger ce qui est nécessaire pour avoir suffisamment de force pour vivre et accomplir leurs pratiques religieuses. Le monde domestique, lui, préfère vivre pour manger. L’être humain a placé la nourriture au centre de la vie et de ce fait il risque de tomber dans le piège d’Iblis. La fonction d’Iblis, c’est le soutien du monde de la satiété, l’entrave à la faim.

La raison pour laquelle Adam a été chassé du paradis est due à son obstination au sujet de la nourriture. C’est son ambition qui a mangé le fruit défendu dans le paradis. Comme dans toute pratique religieuse, et dans le jeûne en particulier, ce qui est important demeure la fidélité et la piété.

Le peu de pratiques religieuses effectuées de façon assurée et pieuse ont plus d’importance qu’une montagne d’actions religieuses effectuées avec hypocrisie, orgueil et arrogance et animées de sentiments prétentieux. Les actes religieux des musulmans lucides et intelligents sont accomplis avec sincérité tout en restant éloigné de l’hypocrisie.

L’objectif du jeûne est de vaincre le vice, de freiner les désirs et de diminuer l’alimentation selon le besoin vital. Si le mal peut être diminué au minimum pour Allah, de part sa nature, il ne débordera pas dur d’autres sujets. Le sommeil, la conversation et l’action restent au niveau minimal. Boire, manger et répondre à ses besoins nécessaires au minimum permettent de diminuer le risque de tomber dans le haram (l’illicite) étant donné que les oreilles s’approchent du faux, la parole et la langue du péché à cause du haram. Ainsi, Allah Ta’âlâ déclare : « Eux donnent de l’oreille aux mensonges et mangent ce qui est haram » 3

Si la personne accomplissant le jeûne s’aperçoit dès la rupture (du jeûne) qu’elle présente une faiblesse dans le cœur lors de l’exécution des pratiques religieuses, elle devra procéder à une voie thérapeutique. La thérapie liée à cette situation est sans conteste la prière à accomplir, les versets du Coran à lire, le dhikr (souvenir d’Allah), le repentir et l’effort d’éliminer les repas consommés et accompagnés de prières. Il est dit à ce propos : « digérez vos repas par le dhikr. » 4

Les diverses variétés de Jeûne

Le jeûne du ramadan est une obligation religieuse de l’Islam et il est particulier. Cependant, pour ceux qui souhaitent atteindre la piété, il existe pour les serviteurs d’autres variétés de jeûne autre que le jeûne du Ramadan :

1- Sawm-i dehr : C’est un jeûne effectué durant toute l’année sans rupture. Ce type de jeûne qui consiste à jeûner en permanence n’a pas été très recommandé ; il est même considéré comme indésirable.

2- Savm-i Davud : Ce type de jeûne consiste à pratiquer le jeûne un jour sur deux tout comme Hz. Davud (David) l’a pratiqué. Le jour jeûné est considéré comme sabra et le jour non jeûné est considéré comme un remerciement à Allah.

3- Le jeûne de l’Eyyam-i biyz : il consiste à jeûner les 13 ème, 14 ème et 15 ème jours du calendrier lunaire. Selon la tradition, on raconte qu’à cause de son péché, le corps d’Adam était devenu tout noir au moment où il descendit sur la surface de la terre. Son repentir a été accepté en présence d’Allah qui lui a ordonné d’effectuer le jeûne de l’eyyam-ı biyz. Ainsi, chaque jour, un tiers de son corps avait blanchi et le troisième jour de l’eyyam-ı biyzın son corps était devenu entièrement blanc. Il est recommandé d’effectuer le jeûne durant ces jours pour vénérer sa mémoire et l’influence de la lune sur le corps humain.

4- Le jeûne du Lundi et du Jeudi : Ce jeûne est préconisé pendant ces jours de la semaine en vue de s’habituer au jeûne et pour dominer nos inconduites.

5- Le jeûne de Cha’ban : après le Ramadan, c’est pendant le mois du Cha’ban que notre cher Prophète a le plus pratiqué le jeûne. On peut effectuer ce jeûne soit pendant les quinze premiers jours, soit pendant les quinze derniers jours. Bien sûr, nous pouvons jeûner plus ou moins longtemps.

6- Le jeûne de Chawwal : c’est un jeûne de six jours qui est pratiqué pendant le mois de Chawwal qui suit le mois du Ramadan.

7- Le jeûne de Zul Hijja et de Muharram : C’est un jeûne de piété recommandé pendant la totalité des dix premiers jours de ces deux mois. Le jeûne du 10ème jour (Achurâ) de Muharram doit être particulièrement pratiqué les 9-10 ou les 10-11 du mois de ce mois.

Le jeûne a une importance et un sens particulier concernant l’exercice de la piété sur le chemin qui mène à Allah. C’est pourquoi il n’y a pas de place pour ce sujet dans la spiritualité musulmane et la littérature des œuvres du Prophète. Les musulmans clairvoyants devront rechercher des occasions, en dehors du climat particulier au jeûne, pour obtenir les bénédictions, le pardon d’Allah et enrichir leurs cœurs.

Annotation: 1) Bukhari, Sawm, 2. 2) az-Zumar, 30/10. 3) al-Maida 5/42. 4) Voir. Keşfü’l hafa I, 74 (Tabarani, Evsat’ından)

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