J’ai trouvé la vérité dans les montagnes

Mar 12, 2019 par

 

Reportage d’Ömer Faruk Yasin

 

Abdurrahman Islam … un musulman qui, il y a environ 40 ans de cela, vivait en Italie, pays considéré comme le centre de la foi chrétienne catholique. À cette époque, il existait peu de ressources concernant l’Islam et l’Europe vivait au centre de différents conflits idéologiques. C’était une époque où la présence des musulmans n’était pas facilement acceptée comme c’est le cas de nos jours. Aujourd’hui âgé de 66 ans, Abdurrahman Islam passe la majeure partie de sa vie en Turquie. Il se sent honoré par son nom de famille qui est Islam. Nous avons eu un entretien avec lui au sujet de son premier voyage en Turquie en 1978, de sa rencontre avec Cheikh Mahmud Sâmi Ramazanoğlu (k.s.) et Cheikh Mûsa Topbaş (k.s.) un an après son arrivée dans ce pays.

Comment viviez-vous avant de devenir musulman ?

Vers l’âge de 16-17 ans, j’ai commencé à faire des recherches sur l’existence du Créateur. C’est pour cette raison je me suis lancé dans l’alpinisme. « Je me demandais si je pouvais trouver la réalité absolue dans les montagnes ? Puis, j’ai trouvé Allah dans les montagnes. »

Pouvez-vous nous dire comment cela s’est passé ?

C’est difficile d’expliquer cela par de simples mots. Un jour, je suis sorti tout seul pour aller dans les montagnes. J’avais seulement pris un sac de couchage. Jusqu’à un certain niveau, tout allait bien. Mais, quand l’atmosphère devint sombre, même la lune n’était pas visible. J’étais sur le point de mourir de peur. Puis, je fermai entièrement ma cotte et attendit en tremblant.

À minuit, lorsque j’ouvris les yeux, la première chose que je vis fut le ciel rempli d’étoiles… J’étais tellement enthousiasmé que j’eus l’impression que ces étoiles étaient toutes rassemblées auprès de mon corps. À ce moment, c’est comme si mon corps avait fusionné avec toutes les créatures. Je me retrouvai en présence d’Allah Ta’ala. Je dis : « D’accord, Allah existe… » C’est à ce niveau que mes recherches commencèrent.

Quel âge aviez-vous quand vous êtes devenu musulman ?

Après le résultat d’une recherche, j’ai embrassé l’Islam à l’âge de 27 ans. Pour comprendre l’Islam, j’ai lu les œuvres des amis d’Allah, des livres traitant de soufisme et de légendes des saints. À ce moment en Europe, l’amour était si grand à l’égard du soufisme. Ensuite, j’appris que pour devenir un adepte du soufisme, il fallait d’abord devenir musulman.

Votre famille était-elle au courant de votre entrée en Islam ?

Oui, elle le savait. Mais leur réaction fut très ferme. Comme au temps de notre Prophète (paix et salut d’Allah sur lui), elle s’opposa à ma conversion, arguant : « Comment est-il possible que tu refuses la religion de ton père et de ton grand-père ? » ou bien : « Quel mal t’a fait

Jésus pour que tu l’abandonnes ? » Je leur ai répondu pourtant avec force : « Il ne m’a rien fait de mal. Maintenant, je l’aime beaucoup plus. » 

Devenir musulman était une décision très difficile pour vous, quels en ont été les préalables ?

Ce fut très difficile en effet. Si pour une personne Dieu existe, changer sa religion devient extrêmement difficile. C’est après une sérieuse recherche que toutes les religions s’unissent, se renouvellent, se rafraîchissent en Islam. Mais vous avez toujours un lien psychologique avec l’ancienne religion. Vous avez votre affection. Vous réfléchissez : « que deviendra ma famille ? Comment réagiront mes amis ? Avec ce genre de décision, cela affecte tout l’entourage. Et puis il y a les problèmes personnels, que m’arrivera-t-il ? Où irais-je ? Trouverais-je du travail ? ”

Embrasser l’Islam a été une décision très difficile pour vous. Comment avez-vous réussi à prendre cette décision ?

En premier lieu, j’ai commencé un nouveau travail dans le nord de l’Italie. Pour cela, je fus obligé de quitter ma famille. Ma plus grande préoccupation était de pouvoir accomplir scrupuleusement mes cinq prières quotidiennes. J’accomplissais mes prières dans les coins ou les endroits isolés.

Un jour, un de mes collègues de travail me dit avec le sourire : « J’ai comme l’impression que tu te caches pour faire quelque chose ! »

Je lui répondis : « Aïe tu m’as attrapé ! Je suis musulman et j’accomplis les actes d’adoration qu’il me revient de faire, mais par peur de votre réaction je les fais en cachette. »

Je vécus un deuxième choc à sa réponse : « Tu es musulman, c’est ton droit et cela ne nous regarde pas ! »

Une fois que je me fus présenté, mes collègues de travail commencèrent à avoir de bonnes pensées à l’égard de l’Islam. Cela à tel point que même jusqu’à aujourd’hui, je continue à voir le directeur. Il n’est pas musulman, mais notre amitié a tellement évolué que grâce à son financement j’ai pu accomplir mon premier pèlerinage (hajj).

Qu’est-ce que cela veut dire ? Cela veut dire qu’Allah le Très-Haut vous ouvre une voie incroyable si vous le voulez, comme un non musulman qui vous apporte une aide.

Le camarade dont j’ai parlé et qui faisait ses comptes me dit un jour : « Je n’ai confiance ni en l’Église ni dans la Croix Rouge. Je n’ai confiance qu’en toi ! »  Et il expédia ses aumônes et sa zakat en Turquie, et pour les expédier il choisit un jour béni. Plus tard il eut une petite fille.

Il me dit : « Le soir avant de dormir je lis une ou deux pages des 40 Hadiths » et il alla jusqu’à donner une bourse à une jeune école en Turquie.

Vous nous avez dit avoir été à la recherche d’un guide spirituel… Pouvez-vous nous parler de cette période ?

Un jour de 1977, dix mois après avoir embrassé l’Islam, je fis la connaissance d’un musulman italien à la mosquée de Rome. C’était un musulman très agréable qui était aussi musicien.

Je lui demandais : « Vénérable frère ! J’ai cette intention, est-ce que vous pourriez me recommander quelqu’un ? »

Il me répondit : « Eh Abdurrahman bey ! J’ai voyagé partout dans le monde musulman. J’ai rencontré des centaines de cheikhs et d’honorables savants. Je reviens juste d’Istanbul et là-bas j’y ai rencontré beaucoup de personnes bénies. Mais, à mon avis, il n’y a pas dans le monde de cheikh supérieur à Cheikh Mahmud Sâmi Efendi. Selon moi, il n’y en a pas de plus grand. »

 

La personne dont vous nous parlez était un disciple de Sâmi Efendi ?

Non seulement il n’était pas lié à Sâmi Efendi, mais de plus il était membre d’une tarîqa. Mais en dépit de tout cela il m’orienta vers Sâmi Efendi.

Après la recommandation de ce musulman, qu’avez-vous fait ?

Compte-tenu de sa recommandation, je suis parti à Istanbul dès que la première opportunité s’est présentée. J’avais en poche une liste d’adresses à visiter. Mais comme je ne connaissais pas le turc, je ne saisissais pas la difficulté de mon entreprise. La veille de rentrer en Italie, la dernière adresse à visiter était la mosquée Iskender Paşa. Je demandais à une personne : « Je recherche cette adresse, mais je ne trouve personne pour m’aider. » Ce frère me montra un magasin en face de la mosquée en me disant : « Ce frère connaît l’italien et il va pouvoir vous aider ! » J’y suis allé et il y avait dans le magasin un joli « tonton » à la barbe toute blanche. Je lui parlais et il me dit qu’il allait m’aider en me disant qu’il était disciple de l’honorable Cheikh Mehmet Zâhid Kotku, mais il ne me l’avait pas dit. Il me dit : « Je connais très bien Musa Topbaş, c’est un de mes très chers frères ». Il prit immédiatement le téléphone pour avoir un rendez-vous et me dit : « Venez ici demain, je vous amènerais en voiture. » Ainsi, la première leçon que je reçus ne fut pas de Sâmi Efendi mais de Mûsa Efendi (k.s.).

Ou avez-vous rencontré Musa Efendi ?

Je l’ai rencontré au köşk de Sultantepe.

Vous y êtes allé seul ?

Oui j’y suis allé seul.

Alors comment vous êtes-vous compris ?

À côté de moi se trouvait un Pakistanais qui parlait l’anglais. Notre Cheikh accepta notre visite : « D’accord je vais te donner des leçons, je vais prendre avec moi un étudiant qui t’expliquera ce que tu dois faire. » Cette nuit-là, un étudiant qui avait étudié en Angleterre vint m’apprendre ce que je devais faire. Ainsi donc, la première année de mon séjour en Turquie, je n’avais rencontré que Mûsa Efendi et l’année suivante je rencontrais Sâmi Efendi. »

Comment s’est passée cette première année ?

Elle s’est passée avec beaucoup d’émotion et d’enthousiasme. J’ai travaillé sur les cours que j’avais reçus.

Et votre entretien avec Sâmi Efendi… ?

À la fin de cette année, c’est-à-dire fin 1978, j’eus un  entretien avec Sâmi Efendi. Le sujet était l’Italie et les services en Italie. Il attachait beaucoup d’importance aux services en Italie. Mûsa Efendi رَحْمَتَ الله عَلَيْهِ puis à présent Osman Nuri Efendi disent de temps en temps : « Rome sera conquise. »

Il devait y avoir dans le secteur de Beylerbeyi une superbe assemblée de conférences. En raison des interdictions, les conférences avaient lieu de façon secrète une ou deux fois dans l’année.

Je pensais en apprenant de si belles choses sur Sâmi Efendi (k.s.) que, pour être un si grand savant, il devait être aussi physiquement un homme de grande stature. (En souriant) Avant les conférences un homme lisait le Coran et comme par hasard cet homme était de grande corpulence. Je pensais que c’était Sâmi Efendi. En réalité, Sâmi Efendi, physiquement parlant, n’atteignait même pas la moitié de la taille de cet homme. C’est comme s’il ne ressemblait qu’à un esprit. De la peau et des os mais, dans le sens complet du terme, une lumière… Il parlait très rarement. Même ses silences étaient différents. Je n’ai jamais oublié le silence qui régnait pendant ses cours. Il émanait des leçons de Sâmi Efendi une très forte inspiration et une bénédiction. L’inspiration d’un de ses cours me suffisait pour une année. Quelques camarades œuvraient à me traduire ses leçons, car je ne connaissais pas le turc. Mais je n’avais même pas besoin de traduction.

Quand avez-vous vu Sâmi Efendi pour la dernière fois ?

La dernière fois que je le vis, ce fut pendant la visite du Hajj en 1982. Après avoir embrassé la foi musulmane, mes rêves avaient cessé. Je fis mon premier rêve ensuite en 1982. Dans mon rêve, Sâmi Efendi était assis devant la Kaaba et me disait en souriant « viens ». Je compris alors qu’il m’appelait. Ce fut la dernière fois que j’eus l’honneur de partir ainsi au pèlerinage. Je le visitais à la maison connue de Mûsa Efendi où il habitait.

Ma vie continua avec des miracles et des merveilles permanents. Je vais vous expliquer comment je suis parti pour la première fois à l’Omra : J’avais fait la connaissance d’un Arabe à Rome. Cet homme était le maire de Jeddah. Il m’hébergea chez lui. Je n’avais ni argent ni rien du tout. Pourquoi je vous raconte cela ? Parce que cela montre qu’Allah regarde votre cœur et dit : « Vous avez l’intention ? D’accord alors l’argent vient de moi. » C’est clair et précis.

Un jour ma femme trouva à la maison une lettre. C’était une lettre qui était venue il y a un certain temps d’Arabie Saoudite et que j’avais rangée car je ne connaissais pas l’arabe. Il était stipulé dans la lettre : « Monsieur Abdurrahman, je suis untel. J’ai un magasin à Médine. Est-ce que vous vous rappelez que vous m’avez rendu visite ? On avait fait connaissance, conversé et vous êtes sorti de mon magasin. InchAllah vous lirez cette lettre parce que le jour où vous avez quitté mon magasin vous avez tout oublié, votre portefeuille, votre argent et votre billet d’avion. Et ne vous offensez pas comme j’étais dans le besoin j’ai utilisé une partie de votre argent. Lorsque vous viendrez je vous les rendrais. »

S’il en va ainsi, comment je suis venu en Turquie sans problème ? Je ne sais pas.

 

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