Introduction à la civilisation musulmane (III)

Mar 12, 2019 par

Pr. Mustayeen Ahmed Khan

 

Xème siècle : première moitié

  1. Fin du règne des Tulunides en Égypte qui fait de nouveau partie du Califat Abasside
  2. Début du Califat Fatimide en Ifrîqiya.

909-1171.  Califat Fatimide en Ifrîqiya, Égypte et Syrie.

929-1031. Califat Omeyyade en Espagne. Capitale : Cordoue. ‘Abd Ar-Rahmân III (m.961), devenu Émir en 912, se proclame Calife.

932-1055.  Règne de la dynastie des Buyides (Bwayhides) en Perse.

  1. Muhammad Ibn Tughj (m.946), nommé gouverneur de l’Égypte par le Calife de Baghdâd, se révolte et s’empare d’une partie de l’Égypte et de la Syrie.
  2. Ibn Tughj est chargé par le Calife de Baghdâd du gouvernement de l’Égypte pendant 30 ans et reçoit le titre d’Ikhshid. Les Fatimides mirent fin au régime Ikhshid en 969.
  3. Les Buyides investissent Baghdâd qui est ainsi dominée par la Dynastie Buyide jusqu’en 1055.

Les Acteurs

Théologie et jurisprudence

  • Abû Ja’far Muhammad Ibn Jarîr Ibn Yazîd At-Tabarî (m.923), savant polyvalent considéré comme le plus grand historien arabe et musulman. Il a dit avoir écrit 40 pages par jour pendant 40 ans ! Ses travaux sur le Coran, la jurisprudence et l’histoire sont l’exemple même d’une merveilleuse érudition. Son « Histoire Universelle : De la Création jusqu’à l’Âge d’Or des Abassides » est aujourd’hui encore régulièrement publiée, car elle donne un récit détaillé des évènements jusqu’en 915. On ne doit pas le confondre avec le philosophe et médecin ‘Alî Rabbân Tabarî du IXème siècle.
  • Les philosophes et théologiens mutazilites de l’école de Baçra : Abû Al-Husayn Al-Khayyât (m. entre 902 et 912), Abû ‘Alî Muhammad Al-Jubay (m.915) et son fils Abû Hâshim ‘Abd As-Salâm Al-Jubay (m.933). Muhammad Al-Jubay, originaire du Khuzistân, était le maître d’Abû Al-Hasan Al-Ash’arî ; ce dernier le quitta et forma une nouvelle école de pensée.
  • Le philosophe et théologien Abû Al-Hasan ‘Alî Ibn Ismâ’îl Al-Ash’arî (m.935), fondateur de l’école de pensée asharite en Islam. Ses ouvrages les plus connus sont Kitâb al-Maqâda al-Islâmîn wa Ikhtilâf al-Muçallîn (Dissertation sur les Musulmans et les Divergences entre Dévots), ainsi que ses deux grandes professions de foi : Kitâb al-Lawmâ (Le Livre du Blâme) et Kitâb al-Ibâna (Accusation). Il a écrit en tout 98 livres et articles, et a énormément contribué à la science du kalâm (discours théologique systématique).
  • Le théologien et juriste Muhammad Ibn Mahmûd Abû Al-Mançûr Al-Mâturîdî de Samarkand, aussi connu sous le surnom de Imâm Al-Hudâ (Imam de la Conduite). Il est né à Mâturîd près de Samarkand, et est mort dans cette dernière ville en 944. Son travail le plus important est Kitâb at-Tawhîd (Le Livre de l’Unicité). Il y a une grande convergence entre les doctrines d’Al-Mâturîdî et d’Al-Ash’arî. La plupart des Hanafites, adhérents à l’école de jurisprudence de l’Imâm Abû Hanîfa, suivent les doctrines théologiques d’Al-Mâturîdî. Les Malikites et les Shafiites suivent les doctrines d’Al-Ash’arî. Quant aux Hanbalites, ils se conforment aux doctrines de l’Imâm Ibn Hanbal, en jurisprudence aussi bien qu’en théologie.
  • Le théologien Abû Ja’far Muhammad Al-Qulinî (m.939) rédige la première compilation shiite de Hadîths, Kafî fi ‘Ilm ad-Dîn (Suffisant dans la science de la Théologie).
  • Le philosophe et théologien andalou Ibn Masarra de Cordoue (m. 931). Il est l’un des premiers représentants de falsafa (philosophie) d’Andalousie et parmi les initiateurs du soufisme collectif dans la région. Suivant sa doctrine, d’autres groupes sont fondés et c’est dans une de ces écoles que se formera le grand mystique de Murcie, Ibn ‘Arabî.
  • Le mystique Shaykh Abû Al-Qâsim Muhammad Ibn Al-Junayd Al-Baghdâdî (m. 910). Il fut disciple d’Al-Muhâsibî en mysticisme et d’Ibn Hanbal en jurisprudence. Il est reconnu comme un des grands docteurs versés en théologie et en droit canon.
  • Les soufis et penseurs mystiques Abû Bakr Ash-CShiblî (m.945) et Abû Mançûr Ibn Husayn Al-Hallâj (m.922). Ils étaient tous deux disciples de Junayd Al-Baghdâdî. La doctrine d’Al-Hallâj sur l’union mystique tient en sa formule tant célèbre : « Anâ al-Haqq (Je suis la Vérité, i.e., je suis Dieu) », pour laquelle il fut exécuté comme blasphémateur.

Science et technologie

  • L’éminent astronome et mathématicien Abû ‘Abdullâh Muhammad Ibn Jâbir Al-Battanî (m. 929), originaire de Harran, latinisé sous le nom d’Albatenius ou Albategnus. Contredisant Ptolémée, il prouve que la position de l’apogée du soleil est variable et que des éclipses solaires annuelles sont possibles. Il a généralisé la loi des cosinus pour les triangles sphériques et a remplacé la corde dans les travaux et les tables de Ptolémée par le sinus. Sa Théorie des Planètes basée sur la trigonométrie fut étudiée avec soin par les futurs astronomes européens, tels que Copernic, Galilée, Kepler et Newton. Il a non seulement introduit la fonction sinus en trigonométrie mais a aussi favorisé l’utilisation de la fonction tangente et cotangente. C’est en utilisant les cotangentes qu’il a déterminé l’inclinaison de l’écliptique et la précession des équinoxes avec une grande précision. Il a imaginé une nouvelle théorie afin de déterminer les conditions de visibilité de la lune, un aspect pratique important dans le calendrier musulman.
  • L’algébriste égyptien Abû Kâmil Shuja Ibn Aslam (m. 930), surnommé Al-Hâsib Al-Miçrî (Le Comptable d’ Égypte). Il a continué le travail d’Al-Khwârizmî et a donné de nouvelles formules concernant le pentagone et le décagone. Son travail, tout comme celui d’Al-Khwârizmî, fut introduit et repris en Europe par l’Italien Léonard Fibonacci de Pise.
  • Le géomètre Abû ‘Uthmân qui a traduit les Commentaires de Pappus et une partie des Éléments d’Euclide.
  • Le mathématicien et astronome persan Abû Al-‘Abbâs Al-Fadl Ibn Hâtim An-Nayrizî de Shîrâz, latinisé en Anaritius (m.922). Il a écrit des commentaires sur les travaux des mathématiciens grecs Euclide et Ptolémée.
  • Le mathématicien, astronome, physicien et médecin Abû Sa’îd Sinân Ibn Thâbit (m.943). en 923, les autorités de Baghdâd décidèrent que seules les personnes possédant un certificat médical seraient autorisées à pratiquer la médecine ; Sinân fut chargé de le délivrer.
  • Le mathématicien Ibrâhîm Ibn Sinân Ibn Thâbit (m. 946), petit-fils de Thâbit Ibn Qurra. Il a travaillé sur les sections coniques et l’aire de la parabole ainsi que sur les conoïdes. Le monde des mathématiques a profondément regretté sa mort précoce, à l’âge de 38 ans.
  • Le mathématicien Abû Nassar Muhammad, pionnier dans l’utilisation du sinus en trigonométrie plane et sphérique.
  • Le mathématicien, astronome et astrologue ‘Alî Ibn Ahmad Al-‘Imranî (m. 955), qui a écrit un commentaire sur l’algèbre d’Abû Kâmil.
  • l’arithméticien Nazîf Ibn Yumn Al-Qâç.
  • L’astronome Husayn Ibn Muhammad Ibn Hamîd, connu sous le nom d’Ibn Al-Âdamî.
  • Les astronomes Amajur et son fils, qui ont édité des tables astronomiques et corrigé le travail de Ptolémée.
  • Yahyâ Ibn Ishâq, médecin et chirurgien de Cordoue durant le règne de ‘Abd Ar-Rahmân III.
  • Bastulus, un célèbre fabricant d’instruments astronomiques.
  • ‘Abbâs Ibn Firnâs, un ingénieur de génie (m. 921). Il a construit la première machine volante de l’Histoire de l’Humanité dirigée par la force humaine ; son expérience eut lieu en Espagne, en 880. À cause d’une imperfection lors de l’atterrissage, il devint le sujet de poèmes satiriques[1]. La défectuosité était due à l’absence de dérive arrière, une nécessité aérodynamique. Outre la mise au point d’une grande horloge, il a construit un planétarium dans lequel il présentait non seulement les planètes et les étoiles, mais aussi les nuages et les éclairs. C’était également un musicien reconnu.
  • Le géographe, historien et mathématicien Abû Al-Hasan ‘Alî Ibn Al-Husayn Al-Mas’ûdi (m.956). De son travail historique principal en 30 volumes, il ne reste plus que le résumé Murûj adh-Dhahab (Les Prairies Dorées), retraçant l’histoire du monde de la Création jusqu’en 947. Il est le premier Arabe à rassembler des faits historiques et géographiques. En outre, il est l’auteur de plus de 20 autres livres.
  • Le géographe Abû Zayd Al-Balkhî (m. 940), à l’origine de la cartographie dans le monde musulman. Son livre Suwar al-Aqâlim est un atlas.
  • Les géographes Qudâma, Abû Dulaf (m. 940), Ibn Rusta d’Ispahan, Ibn Al-Faqîh de Hamadân (m. 903 ?), Al-Hamdânî du Yémen (m. 945, auteur de Çifât Jazîrat al-‘Arab – Caractéristiques de la Péninsule Arabe) et Abû Zayd de la région du golfe persique de Siraf.
  • Ibn Fadlan, historien et géographe. Il fut envoyé en 921 comme ambassadeur et représentant de la théologie musulmane à la cour des Bulgares de la Volga. Il réussit à convaincre de Roi de Bulgare (Bazan moderne) qui se convertit à l’Islam. Il a laissé d’intéressants récits scientifiques de ses voyages.
  • L’agronome et alchimiste connu sous son pseudonyme Ibn Wahshiyya.

Lettres et culture

  • Abû Nasar Muhammad Al-Farabî, latinisé en Alpharabius ou Alfarabi (m.950). Né dans le district de Farab dans le Turkestân, on le surnomme Al-Mu’allim Ath-Thânî (Le Second Maître) dans le domaine de la philosophie ; Aristote étant considéré comme le premier. Commentateur d’Aristote, il a écrit d’importants traités sur l’intelligence, l’âme et ses facultés. En sciences politiques, ses travaux les plus connus sont Al-Madîna al-Fadîla (l’État Idéal) et Siyâsiyât al-Madîna (Politiques d’État), le premier étant aussi célèbre que « La République » de Platon. En philosophie, nous pouvons citer son important ouvrage Tahçîl as-Sa’âda (Acquisition du Bonheur). Dans un autre traité, Ihçâ al-‘Ulûm (Classification des Sciences), il a classifié le savoir en cinq branches: 1) La Linguistique et la Philologie, 2) la Logique, 3) les Sciences Mathématiques subdivisées en arithmétique, géométrie, astronomie, mécanique et sciences gravitationnelles, 4) la Physique et la Métaphysique, 5) les Sciences Politiques, juridiques et Théologiques. C’est la première fois qu’une classification reposant sur des critères scientifiques est établie. C’est également un des meilleurs théoriciens en musique, auteur d’une ?uvre monumentale Kitâb al-Mûsiqî al-Kabîr (le Grand Livre de la Musique) et de quelques-uns des plus anciens chants des derviches mawlawites. On lui attribue en outre 126 livres et traités. Il fut le maître d’Abû ‘Alî Ibn Sïnâ (Avicenne).
  • L’écrivain et poète abbasside Ibn Al-Mutazz (m. 908), auteur d’une nouvelle approche de la poésie Kitâb al-Badi’ (Livre du Nouvel et de l’Étrange). Il est aussi connu dans l’histoire sous le surnom « le Calife d’un jour ».
  • Le poète et théologien zahirite Ibn Dâwûd (m. 910), auteur du Kitâb az-Zahra (Le Livre de la Fleur).
  • Le poète et le grand philologue de l’école de Baçra Abû Bakr Muhammad Ibn Al-Hasan Ibn Durayd (m. 933/4). Il est l’auteur de la belle et célèbre Qaçîda Maqsûra (Court panégyrique) et d’un grand dictionnaire Jambarat al-Lugha.
  • L’écrivain andalou Ibn ‘Abd Rabbihi (m. 940), auteur d’Al-‘Iqd al-Farîd (Le Collier Unique), un style de prose exemplaire.
  • Le poète persan Rudaki (m. 940), auteur de la version persane des fameux ouvrages Kalîla wa Dimna et de Sindbad Nameh (Le Livre de Sindbad).
  • L’éminent calligraphe de Baghdâd Abû ‘Alî Muhammad Ibn ‘Alî Ibn Muqlah (m. 940). Il a inventé le style cursif en arabe, appelé naskhî qui a remplacé le style angulaire kufique. Il a également inventé les styles élégants tawqî et thuluth.

[1]          Cf. Vernet.

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