Un enfant pieux  

Mar 12, 2019 par

Prof. Dr. Hasan Kâmil Yılmaz

En raison de la source divine présente dans son âme, l’humanité possède en elle-même un amour ardent pour l’éternité. Lorsque ses instincts et désirs se développent et que l’enfant devient progressivement un adulte, les parents ont la responsabilité de lui transmettre ce goût pour l’éternel, en tant que dépôt divin (amana, responsabilité). Cette responsabilité est en réalité un passage de relais d’une génération à une autre. De manière générale, l’homme souhaite voir dans ses enfants des successeurs de sa propre génération, de sa propre personne. Or, cette continuité ne possède pas seulement une dimension physique mais aussi une dimension spirituelle et culturelle. C’est la raison pour laquelle les hommes et les prophètes demandent à Allah des enfants de bien, des pieux successeurs.

Cette aspiration est illustrée dans le Coran par la demande de Zacharie (as) à son Seigneur : « Ô mon Seigneur, donne-moi, venant de Toi, une excellente descendance[1]. »

 

Ibrahîm (as) a aussi reçu les bonnes nouvelles d’Isaq (as) décrit comme ghulamin ‘alim (« un garçon plein de savoir[2] »), et d’Ismail (as) décrit comme ghulaminhalim (« un garçon indulgent[3] »). Deux enfants qui constitueront la descendance prophétique d’Ibrahim (as). Honoré par un tel bienfait, Ibrahim (as) prit immédiatement refuge en Allah :

« Louange à Allah, qui en dépit de ma vieillesse, m’a donné Ismaël et Isaac. Certes, mon Seigneur entend bien les prières. Ô mon Seigneur ! Fais que j’accomplisse assidûment la Salat ainsi qu’une partie de ma descendance ; exauce ma prière, Ô notre Seigneur[4]. »

Ainsi, dès qu’il eut su que ses enfants recevraient son héritage prophétique et deviendraient des adorateurs, Ibrahim (as) pria pour qu’ils fussent de pieux croyants, pleinement reconnaissant envers leur Seigneur.

Notons que dans la sourate Al-Baqara, Ibrahim et Ismail (as) – tous deux en tant que prophètes – formulent le même vœu à travers l’invocation suivante :

« Notre Seigneur ! Fais de nous Tes Soumis, et de notre descendance une communauté soumise à Toi. Et montre-nous nos rites et accepte de nous le repentir. Car c’est Toi certes l’Accueillant au repentir, le Miséricordieux[5]. »

À travers ce magnifique verset, Allah nous informe que les enfants pieux constitueront la raison de l’augmentation de la récompense des parents ainsi que de leur baraka(bénédiction) :

« Ceux qui auront cru et que leurs descendants auront suivis dans la foi, Nous ferons que leurs descendants les rejoignent. Et Nous ne diminuerons en rien le mérite de leurs œuvres, chacun étant tenu responsable de ce qu’il aura acquis. »[6]

Dans un autre passage, Allah le Très-Haut nous enseigne directement la dou’a (invocation) à faire afin que notre femme et nos enfants deviennent à nos yeux des perles de lumière :

 

« Seigneur, donne-nous, en nos épouses et nos descendants, la joie des yeux, et fais de nous un guide pour les pieux[7]. »

Nous apprenons ainsi deux choses : premièrement que le bonheur ici-bas provient avant tout de la fréquentation des gens pieux ; deuxièmement que l’honneur en ce bas monde s’acquiert par l’obtention d’un cœur pur, dans le sens où il constitue un guide et une lumière pour les véridiques.

Ce n’est cependant qu’en atteignant l’âge de la maturité – autour de quarante ans – que l’homme prend conscience des attentes qui pèsent sur ses épaules. Le Coran rend compte de cette réalité à de nombreuses reprises :

« Ô Seigneur ! Inspire-moi pour que je rende grâce au bienfait dont Tu m’as comblé ainsi qu’à mes père et mère, et pour que je fasse une bonne œuvre que Tu agrées. Et fais que ma postérité soit de moralité saine, Je me repens à Toi et je suis du nombre des Soumis[8]. »

Cette définition de la descendance décrite comme « moralement saine » contraste avec une autre définition plus négative dans le Coran. En effet, nous trouvons dans plusieurs passages une certaine mise en garde concernant le caractère divisant, frivole et antagoniste des biens et des enfants. Si nous nous en tenons strictement au texte, l’enfant constitue avant tout l’ornement de cette vie éphémère:

« Les biens et les enfants sont l’ornement de la vie de ce monde[9]. »

Ou encore dans la sourate Al-Imrân :

« On a enjolivé aux gens l’amour des choses qu’ils désirent : femmes, enfants, trésors thésaurisés d’or et d’argent, chevaux marqués, bétail et champs ; tout cela est l’objet de jouissance pour la vie présente[10]. »

Ainsi donc, selon l’enseignement coranique, tant que les biens et les enfants nous éloignent de l’adoration d’Allah, ils constituent pour nous des délices illusoires :

« Ô vous qui avez cru ! Que ni vos biens ni vos enfants ne vous distraient du rappel d’Allah[11]. »

Dans ce cas, les biens et les enfants sont des facteurs d’épreuves et de divisions :

 

« Et sachez que vos biens et vos enfants ne sont qu’une épreuve (« fitna ») et qu’auprès d’Allah il y a une énorme récompense[12]. »

Dans un autre verset, nous trouvons la description suivante :

« Ô vous qui avez cru, vous avez de vos épouses et de vos enfants un ennemi [une tentation][13] » ; « Vos biens et vos enfants ne sont qu’une tentation[14]. »

Par conséquent pour les sociétés humaines, la garantie d’un avenir radieux passe avant tout par l’éducation d’une jeunesse pieuse dont le cœur bat pour Allah et sa patrie. De la même façon que l’Islam offre des solutions nobles et adaptées à chaque problème, il expose aussi des principes saints en ce qui concerne l’éducation des enfants. Allah le Très-Haut nous prévient à ce sujet :

 

« Ô vous qui avez cru ! Préservez vos personnes et vos familles, d’un Feu dont le combustible sera les gens et les pierres[15]. »

Quand ce verset fut descendu, ‘Omar Ibn Khattab (ra) demanda au Prophète (ﷺ) :« Ô Messager d’Allah ! En observant les ordres d’Allah et de Son Messager nous savons comment protéger notre propre personne du châtiment de l’enfer. Cependant, comment pouvons-nous protéger nos épouses et nos enfants ? » Le Messager d’Allah répondit alors : « Par leur ordonner les ordres d’Allah et les tenir loin de Ses interdits. C’est de cette manière que vous pourrez les aider à se protéger de l’Enfer[16]. »

Les parents constituent les plus beaux modèles pour les enfants, tant ils incarnent le livre ouvert dans lequel ils acquièrent les règles du bon comportement. Allah dit à cet égard :

 

« Et commande à ta famille la Salat, et fais-la avec persévérance[17]. »

Nous avons dans la personnalité du Messager d’Allah (ﷺ) l’orientation nécessaire pour effectuer notre adoration envers Allah le Très-Haut. De la même façon, les prophètes d’Allah sont des exemples d’éducation des enfants et du temps passé auprès d’eux. Consécutivement à la révélation de ce verset, le Messager d’Allah (ﷺ) rendit visite à sa fille Fatima (ra) tous les matins pendant un mois pour les appeler à la prière. Il était en effet responsable de l’éducation de tous et notamment de celle des membres de sa famille[18]. Leur vertu, leur religiosité et leur bon comportement lui incombaient. À ce sujet, il existe un grand nombre d’ordres divins :

« Offrez des cadeaux à vos enfants et comportez-vous avec excellence parce qu’ils sont pour vous des présents de la part d’Allah[19]. »

 

« La femme, qui s’occupe de l’éducation de son enfant à la maison et moi sommes ensemble au Paradis[20]

S’occuper de la bonne éducation des enfants, leur inculquer la piété ainsi que le caractère distingué du musulman, c’est rendre service à l’ensemble de la société. On rapporte que le Messager d’Allah (ﷺ) a dit : « Aucun parent ne peut offrir un bien meilleur à son enfant que le bon comportement[21]. »

 

Cependant, la transmission du bon comportement à nos enfants requiert en amont la purification de notre propre âme (nafs). Ce n’est qu’après avoir purifié notre for intérieur que nous pouvons incarner l’exemple à nos enfants et ainsi leur dispenser l’adoration d’Allah, l’obéissance à Ses ordres, l’éloignement du mensonge, de la déception, du profit outrancier, de la fornication, de l’alcool et des jeux d’argent. Devenir un modèle, faire preuve de tendresse et de bienveillance envers sa famille, est la méthode d’éducation la plus efficace. Le Messager d’Allah (ﷺ) nous dit à ce sujet :

« Toutes les actions accomplies avec indulgence et douceur gagnent en beauté. Celles qui en sont privées gagnent en mal et en laideur[22]. »

S’adapter au niveau intellectuel de l’enfant et s’amuser avec lui sont des manières muhammadiennes qui ont été élevées au rang d’ordres prophétiques. Le Messager d’Allah (ﷺ) s’intéressait aux enfants, il leur caressait les cheveux, blaguait avec eux, les saluait et leur donnait de la valeur. Il ajouta de plus : « Quiconque a un enfant, qu’il s’amuse avec lui et qu’il devienne son ami au fil du temps[23]. » Quand il parlait aux enfants, notre Prophète (ﷺ) s’accroupissait et tentait de les regarder dans les yeux. En effet, que ce soit au sein de la famille ou au sein de la société, prendre de son temps pour s’occuper des enfants constitue la nourriture spirituelle la plus importante que l’on puisse offrir.

Enfin, à travers le dévoilement des sagesses que Lûqman (as) délivra à son fils, le Saint Coran donne de précieux conseils à tous les enfants souhaitant devenir des hommes pieux :

« Ô mon enfant, accomplis la Salat, commande le convenable, interdis le blâmable et endure ce qui t’arrive avec patience. Telle est la résolution à prendre dans toute entreprise !

Et ne détourne pas ton visage des hommes, et ne foule pas la terre avec arrogance : car Allah n’aime pas le présomptueux plein de gloriole.
Sois modeste dans ta démarche, et baisse ta voix, car la plus détestée des voix, c’est bien la voix des ânes
[24]. »

Pour conclure, nous rappelons que le Messager d’Allah (ﷺ) nous a informés du bien et de la bénédiction de trois choses :

 

« Quand l’homme (ou la femme) meurt, son œuvre s’arrête sauf dans trois choses :

  1. Un bien qu’il a légué en aumônes continues.
  2. Une œuvre scientifique dont les gens tirent profit.
  3. Un enfant vertueux qui prie pour lui ou qui, par ses bonnes actions, pousse les gens à lui bénir ses parents[25]. »

[1]Sourate Al-‘Imrân, 3/ 38-39. Cf. Sourate Maryam, 19/ 7-11.

[2]Sourate Al Hijr, 15/52-53.

[3]Sourate As-Sâffât, 37/ 99-101.

[4]Sourate Ibrâhîm, 14/ 39-40.

[5]Sourate Al Baqara, 2/ 128.

[6]Sourate At- Tûr, 52/2.

[7]Sourate Al-Furqân, verset 74.

[8]Sourate Al-Ahqâf, 46/15.

[9]Sourate Al-Kahf, 18/46.

[10]Sourate Al-Imrân, 3/14.

[11]Sourate Al Munâfiqûn, 63/ 9.

[12]Sourate Al-Anfâl, 8/28.

[13]Sourate AtTaghâbun, 64/14.

[14]Sourate AtTaghâbun, 64/15.

[15]Sourate At-Tahrîm, 66/ 6.

[16]Elmalılı, Hak Dini Kuran Dili, VIIm 5122 vd.

[17]Sourate Tâ-Hâ, 20/132.

[18]Al-Bukharî, Juma’a 11 et Nikah81 ; Muslim, Imare 20 ; Abû Dawûd, Imare 1 ; At-Tirmidhî, Jihad 27 ; Ibn Hanbal, II, 45.

[19]Mevsûaetrafi’lhadis, II, 133, el-Camiu’s-sağirm« hemze » harfi.

[20]El-Camiu’s-sağirm« hemze » harfi.

[21]Mişkatül-mesabih, 4977 nolu hadis

[22]Abû Dawûd, Jihad 1 ; Edeb 11

[23]Al-Camiu’s-sağir, “mim” harfi

[24]Sourate Luqmân, 31/ 17-19.

[25]At-Tirmidhî, Ahkam,36;Muslim, Wasiyyah, 25; Abû Dawûd, Wasiyyah17.

Articles liés

Tags

Partager

Exprimez-Vous