Le rappel d’Allah (dhikr) et son importance dans la vie du musulman

Mar 13, 2019 par

Adem Dereli

L’islam est l’actualisation du pacte originel entre Allah et l’ensemble des créatures. Les êtres humains (dotés de discernement) n’ont été créés que pour l’adoration de leur Seigneur : « Je n’ai créé les djinns et les hommes que pour qu’ils m’adorent. » (Coran, 51 : 56) Les exégètes commentent le terme d’« adoration »[1] par la connaissance et la soumission à Allah.

La notion de soumission à la loi islamique (charia) implique la fidélité aux habitudes de l’Envoyé d’Allah (pbsl) et l’aspiration permanente à la proximité seigneuriale. Allah attend des hommes qu’ils parviennent à la station de l’adoration totale, démunis de tout doute et amalgame. L’acquisition de l’état d’adorateur sincère est subordonnée à la connaissance d’Allah comme attesté dans un hadith qudsi : « Connaissez-Moi avant de M’adorer. Car, celui d’entre vous qui ne Me connaît pas, comment peut-il M’adorer ? » La sourate at-Takathur nous montre que la connaissance d’Allah possède indubitablement trois niveaux. Le premier niveau est la connaissance des attributs divins, des interdits et des agréments relatifs à la loi islamique. Certains savants nomment ce niveau « ‘ilm al-yaqin ».[2] Le second niveau est appelé « ‘ayn al-yaqin »[3] ; c’est la connaissance née de la certitude. Comme si le pratiquant voyait Allah de ses propres yeux. Enfin le troisième et dernier niveau est la connaissance vraie, « haqq al-yaqin »[4], celle qui n’est ni illusoire, ni temporaire. C’est la découverte du vrai.

Posséder cette connaissance implique une hantise permanente de la présence seigneuriale. C’est à cela que l’Envoyé d’Allah (pbsl) fait allusion quand il dit : « Vis dans ce monde comme un étranger ou un passant. » Nous sommes donc créés pour atteindre cette étape d’adoration exclusive de notre Créateur, comme l’a fait l’Envoyé d’Allah (pbsl). Comment donc parvenir à l’adoration véritable ? Pour répondre à cette question, il faut se référer au Coran où Allah dit : « Et cramponnez-vous tous ensemble au ‹Habl› (câble) d’Allah et ne soyez pas divisés (…) »[5] Le câble d’Allah étant le rappel (dhikr) permanent et abondant de la grandeur et de la magnificence divines. En effet, le Coran dit : « Récite ce qui t’est révélé du Livre et accomplis la Salat. En vérité la Salat préserve de la turpitude et du blâmable. Le rappel d’Allah est certes ce qu’il y a de plus grand. Et Allah sait ce que vous faites. »[6]

Définition et différentes formes de dhikr

Le mot dhikr, en tant que tel, est un terme générique d’origine coranique par lequel Allah désigne le souvenir ou la mention de Lui en pensée ou en acte. Le dhikr désigne donc tout aussi bien le culte dans sa globalité que chacune de ses composantes ou sections. Ainsi, l’islam, en tant que moyen de mettre l’être humain en contact avec son Seigneur, est un dhikr. Le Coran, en tant que parole du Créateur, est un dhikr. Sa lecture, la conformité à ses préceptes et la confiance en ses pouvoirs font aussi partie de l’univers du dhikr. De même, l’Envoyé d’Allah (pbsl), en tant qu’émanation physique des avertissements d’Allah, est un dhikr.[7] Par conséquent, mentionner son nom dans l’espoir d’attirer sur lui des bénédictions est un dhikr. Chacun des cinq piliers de notre religion (l’attestation de foi, la prière rituelle, le jeûne, l’acquittement de l’aumône (zakat) et le pèlerinage) est un dhikr. En définitive, le dhikr désigne tout acte nourri ou posé dans le but de plaire à Allah ou de se rapprocher de Lui. Par ailleurs, le dhikr désigne toute récitation répétée d’une formule ou parole sacrée à voix haute ou intérieure ; c’est la mention d’Allah à travers une parole ou formule tirée du Livre sacré[8] ou de la Sunna de l’Envoyé d’Allah (pbsl). Le dhikr, en tant que tel, est un acte majeur qui donne au culte tout son sens. Allah ne dit-il pas dans le Coran : « Et rappelle ; car le rappel (dhikr) profite aux croyants. »[9] Et Son Messager de dire dans un hadith : « Certes, le dhikr est le sens de l’adoration. » Et, selon Abû Hurayra, il aurait ajouté : « Rien n’est plus honoré auprès d’Allah que le dhikr. Précisons cependant que le dhikr véritable va au-delà des actes et des paroles ; il est méditation permanente. C’est pour cette raison que le Prophète d’Allah (pbsl) a dit : « Le dhikr est la clé de l’adoration. »

Les mérites et les avantages du dhikr

Telle une colonne, le dhikr soutient et tranquillise le cœur du croyant. Le Coran dit : « N’est-ce point par l’évocation d’Allah que se tranquillisent les cœurs ? »[10]

Le dhikr est un outil efficace contre l’oubli et l’indolence : « (…) et invoque ton Seigneur quand tu oublies (…) »[11] Le dhikr est un fortifiant qui garantit au pratiquant une assise mentale et morale. À l’opposé, le refus de s’adonner au dhikr est un signe de malédiction. Le Coran dit : « Et quiconque se détourne de Mon Rappel, mènera certes, une vie pleine de gêne, et le Jour de la Résurrection Nous l’amènerons aveugle au rassemblement. »[12] Plus loin le Coran rajoute : « Et quiconque s’aveugle (et s’écarte) du rappel du Tout Miséricordieux, Nous lui désignons un diable qui devient son compagnon inséparable. »[13]

Selon Abû Mûsâ, l’Envoyé d’Allah (pbsl) a dit : « Il est de celui qui se souvient d’Allah et de celui qui ne le fait pas, comme du vivant et du mort. »

Le dhikr est le moyen par excellence pour se rapprocher d’Allah et donc pour être sous sa couverture permanente. Un hadith qudsi rapporte ce propos : Allah le Très-Haut dit : « Je suis selon l’opinion que Mon serviteur se fait de Moi et Je suis avec lui lorsqu’il M’invoque. S’il M’invoque en lui-même, Je l’invoque en Moi, et s’il M’invoque dans une assemblée, Je le mentionne dans une assemblée meilleure que la sienne. Et s’il se rapproche de Moi d’un empan, Je me rapproche de lui d’une coudée ; s’il se rapproche de Moi d’une coudée, je Me rapproche de lui d’une brasse. Et s’il vient vers Moi en marchant, Je viens vers lui en courant.» [14]

Le dhikr est une arme redoutable contre les adversaires et garantit aux croyants une victoire sûre.[15]

– Le dhikr est un moyen rapide de purification de l’âme.[16]

– Le dhikr apporte une élévation spirituelle et constitue sans aucun doute une porte à l’interprétation exacte des « signes » (ayâh) d’Allah.[17]

En définitive, nous pouvons retenir que le dhikr est la source du bonheur en ce monde et dans l’au-delà. Il chasse Satan, il satisfait le Seigneur, il attire et facilite la subsistance, il habille l’évocateur (dhakir) de vénération, il lui fait mériter le respect du Seigneur et, pour ce fait, le Seigneur Lui-même l’évoquera en retour.[18] De plus, le dhikr fait revivre le cœur comme la semence revit par l’action bénéfique de l’eau. Il est la nourriture de l’esprit et il ôte la rouille du cœur. Il apporte la lumière à la réflexion et efface les péchés. Il fait disparaître l’isolement entre le serviteur et son Seigneur, il apporte la sérénité. Il empêche l’être humain de calomnier, de mentir, de forniquer et de s’adonner à tout ce qui est vain. Le dhikr est la plantation du Paradis, l’affranchissement du Feu et l’assurance contre la domination.[19] Le dhikr est une lumière pour le serviteur dans la tombe. Le rappel d’Allah apporte au pratiquant les mérites de ceux qui ont affranchi des esclaves, participé aux batailles dans le but de plaire à Allah et dépensé toute leur fortune dans le sentier de la foi. Enfin, nous voulons terminer par une citation de l’Envoyé d’Allah (pbsl) qui a dit : « Les gens du Paradis regretteront de leur vivant les instants passés sans avoir évoqué Allah le Tout-Puissant. »[20]

Ô Allah ! Guide-nous sur le droit chemin comme Tu as guidé nos pieux prédécesseurs et fais que nous soyons parmi les serviteurs qui T’invoquent en abondance.

Amin !

 

 

 

[1] Li ya’boudoun : « pour qu’ils M’adorent ».

[2] La connaissance avec la science certaine (Coran 102 : 5).

[3] La connaissance avec l’œil de la certitude (Coran 102 : 7).

[4] La connaissance de la véritable certitude (Coran 69 : 51).

[5] Coran 3 : 103.

[6] Coran 29 : 45.

[7] Coran : « Eh bien, rappelle ! Tu n’es qu’un rappeleur », 88 : 21.

[8] « Et invoque ton Seigneur en toi-même, en humilité et crainte, à mi-voix, le matin et le soir, et ne sois pas du nombre des insouciants. » (Coran, 7 : 205)

[9] Coran 51 : 55.

[10] Coran 13 : 28.

[11] Coran 18 : 24 ;

[12]Coran 20 : 124.

[13] Coran 43 : 36.

[14] Hadith rapporté par Ahmad, al-Bukharî, Muslim, Tirmidhî, Nasa’î et Ibn Maja d’après Abû Hurayra.

[15] Coran 8 : 45.

[16] Coran 3 : 135-136.

[17] Coran 6 : 126.

[18] Coran 2 : 152.

[19] Coran 8 : 33.

[20] Rapporté par al-Tabaranî et al-Bayhaqî d’après Mou’adh.

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