Le Prophète (pbsl): notre guide

Mar 13, 2019 par

Pr. Dr Hasan Kamil Yılmaz

Mawlânâ Rumî, en sa qualité de soufi réputé, avait porté au centre de sa vie l’attachement au Coran et à la sunna et en avait fait les principes fondamentaux de sa voie, exprimant sa sensibilité à ce sujet à travers ce fameux quatrain :

 

Coran, je suis ton esclave tant que cette vie sera en moi,

Chaque fois je suis la poussière du pied d’Ahmed al-Muhtâr.

Si l’on porte hors de moi une parole autre, quelle que soit la personne

Je serai vexé de cette parole et de celui qui l’a transportée.[1]

Dans le Masnavî, le Dîvân al-Kabîr et autres ouvrages qu’il écrivit, Mawlânâ Rumî parle fréquemment de notre Prophète (pbsl) en tant que chef et guide. Il le voyait en tant que guide et maître d’une voie spirituelle pure et agréable, disant à ce sujet :

« Sois le pilote du navire dans la mer de pureté, car tu es un second Noé, ô Mustafa. Un guide expert, doué d’intelligence, est nécessaire pour chaque voyage, surtout pour celui qui se fait sur l’eau. Lève-toi ! Vois la caravane égarée : partout une goule est devenue capitaine du navire. »[2]

De tout temps le guide-capitaine a toujours été nécessaire aux hommes, surtout en mer. Par exemple en Mer Rouge, là où les rochers sont nombreux, les bateaux ne peuvent pas voguer en sécurité sans la présence et l’aide d’un guide-capitaine. Les bateaux sont sans cesse exposés au danger que représentent les rochers, car à tout moment ils peuvent s’y briser, mais le guide-capitaine les connaît très bien ainsi que les voies maritimes sécurisées.

Selon Mawlânâ Rumî, notre Prophète (pbsl) est semblable à une lampe, une bougie qui éclaircit les nuits sombres. Sans sa lumière, pour l’humanité, il fait noir même en pleine journée. Sans ta protection, le lion est captif du lièvre.[3]

Dans le Coran, Dieu le Très-Haut, à travers le verset suivant : « Ô, toi, l’enveloppé [dans tes vêtements]! Lève-toi [pour prier], toute la nuit, excepté une petite partie ; Sa moitié, ou un peu moins ; ou un peu plus. Et récite le Coran, lentement et clairement »[4] dévoile à Son Envoyé glorifié les lumières liées au degré du soleil dans le ciel et Son souhait d’encourager l’adoration nocturne et la conscientisation de l’humanité par la lumière de la Révélation. De la même manière que le coucher du soleil fait appel à l’obscurité, il en est de même en ce qui concerne la perte de sa clarté si on laisse les gens privés de lumière. Cela signifie en d’autres termes l’effondrement de l’humanité plongée dans une obscurité bouleversante.

De même que le clair de lune continue sans crainte de répandre sa lumière en dépit des chiens qui aboient, les gens pieux répandent leur lumière aux alentours sans être blâmés ni inquiets d’une quelconque attaque. De même que le chien qui aboie ne détourne pas le clair de lune, les vociférations inutiles des écervelés et autres personnes inconsidérées ne peuvent camoufler la lumière émanant des visages rayonnants des Amis de Dieu.

De la même façon que les personnes aveugles de naissance ont toujours besoin d’un guide sur lequel elles s’appuient pour marcher, un guide qui indique le chemin, qui tient les gens par la main pour les faire sortir des ténèbres est également nécessaire. Ce guide, c’est Muhammad Mustafa (pbsl) que Dieu a éduqué et soumis à l’humanité en passant par toutes les étapes de la vie. Il est le sauveur de l’humanité et maître de la crainte révérencielle (taqwâ) et de la compassion aux univers. Toutes les fois où l’humanité saisira sa main quand elle marchera, elle parviendra à la joie et à la paix.

Le Prophète (pbsl), comme le Coran l’a souligné ainsi que lui-même, est de nature humaine et n’admettait pas qu’on le prenne pour quelqu’un de supérieur à l’instar des peuples précédents, comme les Israélites qui avaient pris Uzair pour le Fils de Dieu et comme d’autres qui ont considéré Jésus comme tel. Afin d’éviter une telle erreur de définition, le Prophète a dit par la voie du Coran : « Je suis en fait un être humain comme vous. Il m’a été révélé que votre Dieu est un Dieu unique ! »[5] Certes, comme le dit également le poète, le Prophète est un être humain, mais un être humain pas comme les autres :

Le rubis est une pierre parmi les autres, mais elle n’est pas comme les autres,

Muhammad est un être humain, mais il n’est pas comme les autres.

 

Nulle ambiguïté dans la nature du Prophète (pbsl) qui relève de la nécessité qu’il fût corporellement humain relativement à la création proportionnelle des anges. Mais la clarté révélatrice de la lumière de la prophétie y apporta de la lucidité et sa lumière devint observable et compréhensible par les hommes.

Mawlânâ Rumî voit l’amour comme un guide entre Dieu et les hommes. L’amour fait des va–et-vient entre Dieu et l’homme en faisant circuler l’information par les deux côtés. Lorsqu’on considère ce hadith qudsi[6] informant que Dieu, quand Il aime Son serviteur, sera Son œil qui voit, Sa main qui tient, Son pied qui marche, cela met en évidence cette communication. De ce point de vue, selon Mawlânâ Rumî, ceux qui sont sources d’inspiration à l’honneur peuvent prendre auprès du Prophète (pbsl) des enseignements imperceptibles et inconnus parce qu’il est le trésor de toute bénédiction. Ceux qui sont proches de Dieu portent le vêtement de la taqwâ qu’ils ont eux-mêmes emprunté du Prophète (pbsl)[7]

Mawlânâ Rumî exprime ainsi sa nostalgie et sa supplication envers le Prophète glorifié (pbsl) :

 

Ô chandelle qui éclaire la terre et allume le ciel !

Regarde ma situation, écoute mes cris d’appel, mes soucis comme une montagne sur mon dos.

 

J’ai fui des milliers de désastres, je me suis réfugié auprès de ta charité et de ton obéissance,

De ta main bénie, rend illustre, j’ai besoin de ton salut.

 

Ô Béni, tiens ma main, purifie de l’intérieur mes sentiments au monde,

Accorde mon vœu quant à l’au-delà, que je me sauve d’y penser.

 

Le Seigneur, dans le livre, t’a annoncé une bonne nouvelle avec la conquête et la candeur,

Ô Prophète, ouvre la porte de la conquête, de là-bas regarde-nous avec affection.

 

Dieu ouvrit sa poitrine et l’a rendue large

Imagine un cœur plein d’amour et de bienfait pour nous.[8]

 

 

Ô sultan éternel, lune du ciel !

Tu es la source de la vie, nulle limite dans ta générosité et ta bonté,

Ton eau claire, ta précieuse religion m’ont donné la vie,

Sont élucidés les profondeurs liées à la perception de Dieu.

 

Tu possèdes un sourire qui parle à l’homme de la vie,

La vie par ton amour coule dans la profondeur de la mer.

Ô vous qui êtes enivrés par l’amour du monde ! Réveillez-vous !

Dans le jardin de ce glorieux prophète, parfumez-vous avec les roses.[9]

 

Selon Mawlânâ Rumî, l’amour du Prophète (pbsl) est tel un chasseur de gazelles qui ne chasserait que les gazelles parfumées de musc. À chaque fois que le chasseur poursuit son gibier, un parfum de musc se répand dans le ventre de celui-ci. Une fois ce parfum répandu, le chasseur poursuit son gibier sans ressentir aucune fatigue, animé d’un ardent désir de l’attraper. Ainsi, celui qui suit les traces du Prophète (pbsl) marche sans se fatiguer à cause d’un parfum qui ressuscite les cœurs.[10]

Muhammad Mustafa (pbsl), guide pour le salut du monde, l’est aussi en matière d’intercession quant à l’au-delà. Ce monde est un monde au sein duquel les recommandations religieuses sont vécues et où les serviteurs de Dieu sont éprouvés. Quant à l’au-delà, c’est à la fois un monde de récompenses et de sanctions, là où la balance pèse les actes et les comptes sont réglés. Il est celui dont les invocations ouvrent les deux portes et sont acceptées favorablement dans les deux mondes. C’est pour cette raison qu’il est supérieur à tous les prophètes et qu’il est le dernier. On dit à ceux qui parviennent à terminer leur œuvre : « Cette œuvre est définitivement parachevée ». De même que cette expression exprime une limite de maturité et de finalité, la formation de sa qualité prophétique exprime également ce fait.

Il sera le premier intercesseur dans l’au-delà. Les gens feront appel à leur ancêtre Adam (sur lui la paix) pour qu’il intercède en leur faveur, mais celui-ci les orientera vers le dernier Prophète (pbsl).[11] Le droit de revendiquer l’intercession n’appartient qu’à ceux qui se sont enduits de sa peinture, à ceux qui se sont moulés une morale fondée sur la sienne et à ceux qui lui ont obéi.

[1] Şefik Can, Hz. Mevlânâ’nın Rubâileri, b. 1311.

[2] Masnavî, IV, b. 1457-1460. Trad. E de Vitray-Meyerovitch.

[3] Masnavî, IV, b. 1456. Trad. E. de Vitray-Meyerovitch.

[4] Coran, al-Muzzamil, 73/1-4.

[5] Coran, al-Kahf, 18/110.

[6] Bukhârî, Riqâq, 38.

[7] Dîvân al-Kabîr I, 55. 8.

[8] Dîvân al-Kabîr, IV, 1974.

[9] Dîvân al-Kabîr, VI, 2892.

[10] Dîvân-ı Kebîr, VI, 2892.

[11] Voir Bukhârî, Tavhîd, 36; Muslim, Imân, 322.

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