De la vérité relative à l’Islam

Mar 13, 2019 par

Prof. Dr. Ethem Cebecioğlu

Il existe un sérieux problème en matière de véritable enseignement de l’islam. Essentiellement de nos jours, au sein des nombreuses tempêtes de critiques enregistrées dans les médias, cela a pris une dimension véritablement incommodante.

Afin de réaliser de bonnes éditions sur les sujets d’ordre religieux, les éditeurs n’hésitent pas à faire appel à des conseillers spécialistes et qualifiés. Cependant, relativement à la thèse selon laquelle il existe des différentes conceptions de l’islam en Turquie et partout dans le monde, il est très difficile de confirmer que ce pluralisme est à 100% dû au véritable enseignement de l’islam. En 1990, afin de déterminer les divers groupes liés à l’islam en Turquie, nous avions chargé un des nos étudiants en master de procéder à ce travail. Les recherches achevées, le nombre de ces groupes ne s’élevait pas entre 15 et 20 comme Ruşen Cakır l’avait affirmé dans son « verset et slogan », mais plutôt à 148. Encore selon notre opinion, ce nombre est même passé à plus de 200 aux alentours de l’année 1997. Ces groupes sont pratiquement tous apparus en fonction d’une conception fondée sur le Coran et la Sunna. Face à ce fait et à la lumière du verset coranique (az­-Zuhruf, 43/32) : « Est-ce eux qui distribuent la miséricorde de ton Seigneur ? » nous pensons qu’il est mal approprié de porter un jugement tel que : « Telle confession conduit au Paradis et telle autre à l’Enfer » à la place d’Allah. Partant des deux sources fondamentales et invariables des croyants, nous pensons que le développement des différentes conceptions signalées par des versets coraniques tels que : « (…) chacun agit selon sa méthode » (al-Isra, 17/84), « mais ils se sont divisés en sectes, chaque secte exultant de ce qu’elle détenait » (al-Mu’minun, 23/53), « (…) et certes chaque tribu sut où s’abreuver ! (…) » est explicative quant à la préexistence des divergences de tempérament dans la création.

Pour nous, toute conception fondée sur les principes du Coran et de la Sunna conduit au Paradis. Là-bas prendra fin le manque de dialogue dû à l’institutionnalisation (ou à la divergence) dans le monde ; les rancunes nourries les uns contre les autres feront place à des causeries mutuelles. Un verset coranique fait état de cette réalité : « Et Nous aurons arraché toute rancune de leurs poitrines : et ils se sentiront frères, faisant face les uns aux autres sur des lits. » (al-Hijr, 15/47)

Ici, puisque chaque groupe se voit l’unique porteur de la vérité et de ce fait considère les autres comme erronés, il est absolument nécessaire que nous parvenions à user de finesse en la matière. Comme l’a souligné un grand penseur de ce siècle, l’avènement des deux cents conceptions différentes de l’islam nous amènera au vrai sens du Tawhid (Unicité divine) au-dessus même de ces conceptions.

« Ne dis pas que je suis le seul à avoir raison, mais seulement que je fais partie de ceux qui ont raison ». Autrement dit, c’est affirmer que toutes les conceptions islamiques issues directement du Coran et de la Sunna sont toutes justes ; je suis aussi l’un d’eux est pour nous un comportement qui dépasse le temps et l’espace, car cela est assiégeant, unissant et vivifiant.

En réalité, l’accès aux différentes conceptions de la communauté musulmane est une bénédiction. Harun ar-Rashîd pensait qu’une seule conception pouvait être inchangeable et soumise à son peuple comme telle, mais ayant fait part de cet avis à l’Imam Malîk, ce dernier lui fit savoir qu’un seul point de vue serait susceptible de causer des désagréments.

Pour nous également, une deuxième raison de l’avènement de ces différentes conceptions de l’islam, c’est la structure socioculturelle de la société en général. À titre d’exemple, à travers des ouvrages écrits par des savants de l’Inde[1] tels que Abul A’la Maudoudi, nous pouvons démontrer qu’ils ont fait montre d’un fort engagement islamique en matière de politique. Cet état s’avère équivalent avec des intellectuels et des savants originaires d’Afrique du Nord alors sous domination française et italienne. Et cette situation lorsqu’on l’évalue du point de vue de la nature de l’homme doit être vue comme normale et penser les abstraire de leur environnement culturel peut nous faire tomber dans des erreurs d’évaluation.

Le phénomène de l’acculturation est également l’une des causes de cette pluralité dans les conceptions de l’islam. Ce mot traduit l’ensemble des phénomènes qui résultent d’un combat continu et direct entre des groupes d’individus issus de cultures différentes et qui entraînent des modifications dans les modèles culturels initiaux de l’un ou des deux groupes. Ceux qui sont éduqués selon la mentalité anglo-saxonne, ceux qui sont sous l’influence des médias et autres valeurs (physiques et morales) socioculturelles de l’Europe (ou de l’Amérique) font des efforts pour que l’islam se conforme à eux au lieu que ce soit eux qui se conforment à l’islam. Les tentatives d’engagement vis-à-vis des configurations artificielles et certaines spéculations relatives au Coran restées sous l’influence du courant historistique dont Doppier a annoncé le désastre restent tout à fait intéressantes.

À côté des raisons culturelles, géographiques, anthropologiques, folkloriques, sociologiques et culturelles qui accompagnent la genèse de ces différentes conceptions de l’islam, nous pensons qu’il est également nécessaire de ne pas oublier les faiblesses de l’homme. Car à ce sujet, le désir de l’ego est de définir la religion selon son choix au lieu de prendre en compte les principes déjà établis. Nous voudrions à ce propos formuler brièvement cette réalité en ces termes : si quelqu’un n’est pas détenteur d’un style de vie conforme à l’islam, avec le temps il pensera que ce qu’il vit présentement c’est l’islam.

Avoir accès au véritable islam, c’est avant tout faire en sorte que tout sujet le concernant soit traité méticuleusement : c’est un problème d’esprit et de mentalité. Quelle que soit la vérité de la source, si l’édifice de la mentalité n’est pas en conformité avec les standards reconnus, il ne nous est pas possible d’accéder au véritable islam. Bien que le sujet qui nous occupe présentement soit le principal (de cet article) et qu’il serait nécessaire d’en dire beaucoup plus sur ce thème, nous sommes contraints d’en dire peu à cause d’un problème de restriction de texte. Effectivement, nous avons remarqué que beaucoup de madâhib[2] qualifiés de déviants dans l’histoire sont néanmoins liés au Coran et la Sunna.

Le vrai islam s’apprend avec la vraie source. En tant que première source, le Coran, révélé par Allah, n’a subi aucune modification. La deuxième source est ce qui est rapporté par les hadiths pieux. Quant aux autres sources, ce sont des domaines formés à partir de la lumière des deux sources principales. Cependant, force est de constater qu’il existe toujours des obstacles à franchir en matière d’accession méthodologique en islam, notamment ce qui concerne le développement obligatoire de l’esprit par le savoir.

Enfin, pour ceux qui désirent approfondir les sciences islamiques sans être pour autant des spécialistes en la matière, nous vous conseillons vivement la lecture du fameux Ihya‘ ‘Ulum ad-Din de l’imam Ghazalî, une somme théologique incomparable. Vivre correctement l’islam passe par une compréhension juste de l’islam. Qu’Allah fasse de nous ceux qui ont réussi dans cette voie. Amin !

[1] A l’époque sous domination anglaise.

[2] Le mot madhab ou mazhab (arabe : مذهب [madhab], pluriel : مذاهب [madâhib], conception ; croyance ; école juridique musulmane) évoque en arabe une voie suivie dans l’interprétation des sources traditionnelles (Coran et hadith).

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